A peine la Lettre de Zola est-elle publiée que des émeutes lui répondent dans plus de 20 villes dont Paris, Marseille, Lyon, Nancy, Bordeaux, Nantes, Perpignan, Angers, Rouen, Dijon, Châlons-sur-Saône, Reims... Les manifestants défilent avec des slogans tels que : "Conspuez Zola" ou "Mort aux Juifs" !
18 juillet 1898.
Zola a été poursuivi en justice pour... 18 lignes de son "J'Accuse..." Il est condamné à la peine maximum : un an de prison. Il part à Londres pour un exil qui durera onze mois.
1899.
Un nouveau Conseil de guerre réexamine enfin l'affaire Dreyfus. Ce dernier se retrouve à nouveau condamné mais à 10 ans de travaux forcés. Une grâce présidentielle lui est accordée.
1906.
La Cour de cassation réhabilite Dreyfus.
Manuscrit de la Lettre de Zola :
- "... la vérité est en marche, rien ne l'arrêtera."
(Graph. JEA/DR).
Pour saluer à ma manière l'anniversaire du 13 janvier 1898, j'ai tenté de rassembler quelques réponses se voulant des gifles à Dreyfus ainsi qu'à Zola. Les mots appartiennent aux dictionnaires de la haine, de l'extrémisme de droite, de l'antisémitisme. Le régime de Vichy et la collaboration représenteront un de leurs aboutissements.
Ces extraits n'ont pas la prétention de dresser un tableau exhaustif. Mais ils sont autant de révélateurs. Aujourd'hui encore.
La Libre Parole :
- "Le honteux, le misérable officier qui a vendu les secrets de la défense de notre pays et qui a ainsi commis la trahison est le capitaine Dreyfus".
(1 novembre 1884).
La Croix, "le journal le plus antijuif de France" :
- "Les juifs ont pullulé dans l’Université, dans l’administration, dans la magistrature, dans l’armée elle-même, jurant que le Christ ne compte plus pour la société moderne, et que la race déicide va conquérir le monde."
(3 novembre 1894).
Edouard Drumont :
- "Judas Dreyfus ! ! !"
(La Libre Parole, 10 novembre 1894).
Claude Lourmont :
- "Depuis huit années sans trêve, sans repos, Drumont montre à la France entière le caractère juif, le danger juif, les exemples se succédant de jour en jour. Rien n’y fait. […]. C’est au français, aux électeurs seuls, qu’appartient le remède vraiment curatif; nous voulons encore espérer qu’ils réfléchiront et délivreront la France de la plaie juive en laissant sur le carreau les protecteurs invétérés de la race."
(La Libre Parole, La France aux Français, 10 novembre 1894).
Caricature en première page du
Grelot, le 11 novembre 1894.
Guesde et Jaurès portent une bannière maçonnique. Dreyfus s'exclame : "
Moi aussi, je fais ma bedide gommerce internationaliste, et pis après ?"
Un fantasmatique complot judéo-maçonnique qui aura toujours de beaux jours sous Vichy... Quant à prêter un accent supposé allemand à un(e) adversaire, c'est encore d'actualité en France.
(Doc. JEA/DR).
Le Grelot :
- "Le traître Dreyfus était un homme d’affaire protégé par la haute juiverie, dont Reinach et Rothschild sont les souverains pontifes."
(11 novembre 1894).
Emile Pouget :
- "Un youtre alsacien, Dreyfus, grosse légume au ministère de la Guerre, a bazardé un tas de secrets militaires en Allemagne. Ohé, bourgeois, ne vous épatez donc pas; les militaires ont ça dans le sang."
(
Le Père peinard, novembre 1894).
Léon Daudet :
- "Il n’a plus d’âge. Il n’a plus de nom. Il n’a plus de teint. Il est couleur traître. Sa face est terreuse, aplatie et basse, sans apparence de remords, étrangère à coup sûr, épave de ghetto (…). Le misérable n’est pas français. Nous l’avions tous compris part son acte, par son allure, par son visage. Il a comploté notre désastre, mais son crime nous a exaltés."
(
Le Figaro, 6 janvier 1895).
1895. Chanson antidreyfusarde de Lelièvre et Spencer (Doc. JEA/DR).
Charles Maurras :
- "Le parti de Dreyfus mériterait qu'on le fusillât tout entier… cette affaire était et est vitale pour nous. À bas les Juifs ! À bas les Juifs !"
(Lettre à Barrès, 2 décembre 1897).
Léon Daudet :
- "Derrière le cercueil de mon père, portant un des cordons du poêle, il [Zola] se contenait : mais les « A bas Zola », qui partaient de la foule parisienne (…) le rendaient pâle et titubant. Il m’apparaît, au souvenir, ruisselant de fiel, et assouvissant dans son œuvre, la rage de dégradation qui le tenait contre l’ensemble du genre humain."
(Funérailles d’Alphonse Daudet, 20 décembre 1897).
Jean Baffier :
- "La lutte doit être aujourd'hui et sera demain, en France, entre deux idées dominantes tenant de deux traditions. D'un côté, les cosmopolites dits humanitaires-libertaires, procédant de races juives ainsi que des sémites nomades du bassin de la Méditerranée, avec leur idéologie ténébreuse et anarchique, leur matérialisme outrancier ; leur rapacité mercantile et leur instinct de turpitude. De l'autre, les hommes du pays, relevant des traditions celtiques, avec leur religion basée sur l'administration et l'étude de la Nature ; leur science sociale établie sur l'équité et la Justice, l'esprit familial, le respect de l'Ïuvre ancestrale, le culte des héros, le sentiment de l'honneur, l'entente de la probité et de la dignité du travail."
(
Les marges d’un carnet d’ouvrier, 1898).
Jean-François Latrique :
- "
Un jour un youpin
Rencontra Zola-Pot-Bouille
Et lui dit : Malin
Viens nous donner un coup d’main
Nous payerons pour ça
Pas besoin d’avoir la trouille
A ce discours-là
Sourit la gueule à Zola
Zola répondit :
Du coup « J’en fais mon affaire »
Mais mon vieux Youdi
Faut payer avant midi
Le Youtre paya
Emile empocha l’salaire
On vit. Oh ! la ! la !
Rire la gueule à Zola"
(Chanson éditée par Léon Hayard, 18 janvier 1898).
Edouard Drumont :
- "Ecoutez le cri qui s’élève de tous les coins de France : « A bas les Juifs ! » C’est le cri du passé sans doute, mais c’est aussi le cri de l’avenir…"
(
La Libre Parole, 22 janvier 1898).
Maurice Barrès :
- "Zola ? Profondément, par ses racines, il n’est pas un Français."
(
Le Journal, 1 février 1898).
La Croix :
- "L’armée, en se défendant des soufflets les plus retentissants, entame ce soir le procès contre les ennemis communs du Christ et de l’Eglise. C’est donc la libre pensée, avocate des juifs, des protestants et de tous les ennemis de la France, qui est sur la sellette de Zola."
(8 février 1898).
Ernest Judet :
- "Il était inévitable que Zola ait discerné d’emblée, dans cette armée qu’il déteste, Dreyfus comme officier modèle ; il devait aller spontanément, sans efforts, à la trahison, comme les bêtes stercoraires vont au fumier et se délectent dans la pourriture. Le capitaine aux gages de la Triple Alliance représente bien le type idéal qu’il nous souhaite pour chef et dont il essaie (…) de nous infliger la satanique réhabilitation ; c’est dans cet égout qu’il lui plaît de plonger la splendeur du drapeau tricolore."
(
Le Petit Journal, 23 mai 1898).
Maurice Barrès :
- "La mise en liberté du traître Dreyfus serait après tout un fait minime, mais si Dreyfus est plus qu'un traître, s'il est un symbole, c'est une autre affaire : c'est l'affaire Dreyfus ! Halte-là ! Le triomphe du camp qui soutient Dreyfus-symbole installerait décidément au pouvoir les hommes qui poursuivent la transformation de la France selon leur esprit propre. Et moi je veux conserver la France."
(
Le Journal, 4 octobre 1898).
André du Quesnay de Boisandré :
- "A l’heure actuelle, on peut dire qu’il y n’y a plus dans notre pays que deux partis en présence : d’un côté, les Juifs et les agents de l’Etranger ; de l’autre, la France."
(
Petit catéchisme antijuif, 1899).
A g. : caricature de Dreyfus par Victor Lenepveu pour son Musée des Horreurs (1900).
A dr. : caricature du juif par l'Institut des Questions juives, l'antisémitisme officiel sous Vichy.
(Mont. JEA/DR).
Charles Maurras :
- "Il faut admettre à la base du dreyfusianisme les moyens financiers de la Jérusalem terrestre ; mais la Jérusalem céleste, le chœur de ces idées juives vulgarisées de 1517 à 1789, à 1848, à 1898, explique et peut seule expliquer un succès si profond et si général de l'or juif (…).
On n'a pas voulu voir les causes, les vraies causes du dreyfusianisme. On n'a pas voulu voir qu'avant même qu'Alfred Dreyfus ne fût au monde, la France était bien infectée du virus dreyfusien. On n'a pas voulu voir que le grand secret de notre faiblesse, pendant les trois années tragiques de l'Affaire, tenait à ce que le parti national était dénué d'idées directrices qui fussent propres à balancer la doctrine des dreyfusiens. Le parti national subissait à son insu la loi d'un anarchisme fortement systématisé."
(In
Madame Paule Minck, 1 mai 1901).
Maurice Barrès :
- "Dreyfus n'appartient pas à la nation... Dreyfus est un déraciné qui se sent mal à l'aise dans notre vieux jardin français (...).
Judas ! Traître ! Ce fut une tempête. Fatale puissance qu’il porte en lui, ou puissance des idées associées à son nom, le malheureux détermine chez tous des charges d’antipathie. Sa figure de trace étrangère, sa raideur impassible, toute son atmosphère révoltent (…). Il n’est pas de ma race (…). Garde à vous, patriotes ! Quand donc les Français sauront-ils reconquérir la France ?"
(
Scènes et doctrines du nationalisme, Félix Juven, 1902).
1906 : Alfred Dreyfus est réhabilité (Doc. JEA/DR).
L’Action française :
- "La République est le gouvernement des Juifs, des Juifs traîtres comme Dreyfus, des Juifs voleurs, des Juifs corrupteurs du peuple et persécuteurs de la religion catholique. (...)
La République est le gouvernement des francs-maçons qui n'ont qu'une haine, l'Eglise, qu'un amour : les sinécures et le Trésor public ; fabricants de guerre civile, de guerre religieuse, de guerre sociale, ils nous mènent à une banqueroute matérielle et morale, celle qui ruinera le rentier et l'ouvrier, le commerçant et le paysan.
La République est le gouvernement de ces étrangers plus ou moins naturalisés ou métèques qui, ces jours-ci, souilleront du cadavre de leur Zola le Panthéon désaffecté ; ils accaparent le sol de la France ; ils disputent aux travailleurs de sang français leur juste salaire."
(Affiche, 1908).
L’Action française :
- "Quelque jour, après lecture d'un arrêt de justice, - arrêt définitif sans merci celui-là ! - douze balles lui apprendront enfin l'art de ne plus trahir et de ne plus troubler ce pays qui l'hospitalise."
(29 janvier 1912).
Abel Bonnard, "de l’Académie française" :
- "Les juifs : pour eux, la politique, c’est la discorde à domicile. Benda dit qu’il voudrait une affaire Dreyfus éternisée : c’est là un témoignage sans prix du fait que les juifs ont besoin de la guerre civile. Ce sont les juifs qui introduisirent dans le corps de la France, dans la tour France, une âme étrangère, par le moyen de l’idéologie révolutionnaire, c’est-à-dire par la faute des Français."
(
Berlin, Hitler et moi, 1937).
Céline :
- "Le capitaine Dreyfus est bien plus grand que le capitaine Bonaparte. Il a conquis la France et l’a gardée."
(
Bagatelles pour un massacre, Denoël, 1937, p. 199).
Lucien Rebatet :
- "Dans le déluge de sottises de l’Affaire, Maurras écarte les mensonges, les sophismes, les jérémiades, les avocassiers, rappelle les Français au seul sentiment qui devrait les étreindre. Dreyfus victime ? Dreyfus la honte ? Non ! Dreyfus la calamité ! Pour tous les maux qui ont fondu sur notre pays en son nom."
(
Je suis partout, N° spécial, février 1939).
A g. : La Libre Parole, en pleine Affaire Dreyfus (1893).
A dr. : l'affiche de l'exposition "Le juif et la France" au Palais Berlitz de Paris (5 septembre 1941-15 janvier 1942).
(Mont. JEA/DR).
Armand de Puységur :
- "Dans le dreyfusisme, nous sommes en présence non pas de deux juifs, ni de dix, ni de vingt, mais bien devant la mobilisation mondiale de la juiverie.
(Qu’était le juif avant la guerre ? Tout ! Que doit-il être ? Rien !, Baudinière, 1942, p. 51).
Lucien Rebatet :
- "L’affaire Dreyfus – à l’origine, ne l’oublions jamais, dix youtres qui jouent vingt mille officiers français !"
(Je suis partout, 28 avril 1944).
Charles Maurras :
- "C’est la revanche de Dreyfus."
(Devant la cour de Lyon venant de le condamner à la réclusion perpétuelle, 27 janvier 1945).
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