MO(T)SAIQUES 2

"Et vers midi
Des gens se réjouiront d'être réunis là
Qui ne se seront jamais connus et qui ne savent
Les uns des autres que ceci : qu'il faudra s'habiller
Comme pour une fête et aller dans la nuit ..."

Milosz

lundi 28 novembre 2011

P. 93. Fin Novembre 1812 : la Bérézina...

.
Les hommes de Napoléon, Témoignages 1805-1815, omnibus, 2001, 941 p.

Présentation par omnibus :

- "Ceux qui l'ont suivi jusqu'au bout racontent. 900 pages de souvenirs, extraits de Mémoires, de Souvenirs et de lettres intimes choisis de façon à raconter toute l'histoire de la Grande Armée depuis 1805 jusqu'à 1815."

4e de couverture :

- "Silvain est un soldat de seize ans, engagé volontaire. Jean-Marie est un briscard de trente ans, grognard de la Vieille Garde. Adam est officier d'ordonnance auprès de l'Empereur. La Flize est chirurgien major. Ils viennent de Provence, du Jura, du Nord, de toute la France. Tous, ils l'ont suivi jusqu'à Moscou en passant par Austerlitz, Iéna, Wagram, mais aussi Madrid et Baylen. Ils le suivront encore au-delà de la Bérézina et, pour finir, à Waterloo... Ce sont les hommes de Napoléon.
Un jour, ils ont posé les armes. Ils ont vieilli. Et, par chance pour nous, ils se sont finalement décidés à écrire leurs souvenirs, les meilleurs ? ah ! le soleil d'Austerlitz ! ? et les pires : la boue, la glace, le sang.
Ces souvenirs sont une mine d'or de la mémoire. Voici les plus émouvants d'entre eux, extraits et agencés de façon à écrire l'histoire de la Grande Armée. Mis bout à bout, ces documents devenus introuvables, dénichés au fond des archives, font l'effet d'un grand film épique. Pour un peu, on entendrait cliqueter les sabres !
Présenté par Christophe Bourachot."

Laurent Lemire :

- "Cette anthologie nous fait entendre des voix inconnues, venues des douleurs de la guerre. Pas des penseurs, pas des généraux, mais des grognards qui grognent, de jeunes officiers qui officient, des soldats qui bavardent, des hommes qui marchent près de 40 kilomètres par jour et qui, harassés mais portés par un dessein et un destin qui leur échappent, semblent toujours prêts à crier «Vive l'Empereur!».
Nous avons tellement lu les témoignages des poilus de 14-18 sur la violence des tranchées que nous en avons presque oublié le carnage derrière la grande geste napoléonienne, les convois qui roulent sur les cadavres et font craquer les corps des cuirassiers, les mares de sang et de boue mêlés, les mutilés qui continuent de ramper sous le tonnerre des canons, le jeune chirurgien qui résume Eylau à «une vraie boucherie» ou cet officier qui avoue avoir tué 242 ennemis à l'arme blanche.
Lors de la campagne de Russie, qui fit 200.000 morts côté français, les grognards mangèrent pour la première fois du cheval. En Espagne, où le typhus s'invita, ce fut pire. Sur l'île de Cabrera, dans l'archipel des Baléares, quelques prisonniers français tirèrent au sort des «volontaires» qui acceptèrent de mourir pour servir de nourriture aux autres. «On enlevait à ceux désignés par le sort, les cuisses, jambes et bras que l'on faisait rôtir sur un feu avec du bois de sapin.»
Tous ces textes ont été publiés, dans des livres, dans des revues, puis oubliés depuis la fin du XIXe siècle. Au terme de dix ans de recherche, Christophe Bourachot leur redonne vie en montrant la permanence de la bravoure et de la mort dans cette conquête impériale. D'Austerlitz à Waterloo, tout cela est raconté par ceux qui ont vécu et souffert pour le Petit Caporal, dans une dévotion quasi sacrificielle. Une épopée que l'on reçoit comme un vrai choc."
(Le Nouvel Observateur, 28 avril 2011).

La Bérézina sous les pinceaux de J. Suchodolski, 1866 (DR).

Le 27 novembre 1812
le sergent Bertrand
arrive sur la Bérézina...

- "La journée se passe à changer de positions, et à échanger quelques coups de feu avec l'ennemi. Le soir, la division établit ses feux de bivouac sur la lisière d'un grand bois. Nous avions là de gros et vieux chênes pour nous chauffer, mais rien à manger.
Au moment où je m'apprêtai à dormir devant un bon feu, on m'apprend qu'une de nos cantinières, Louise, est sur le point d'accoucher et souffre beaucoup. Tout le régiment (1) s'émeut et s'ingénie pour secourir cette malheureuse femme qui se trouve sans nourriture, sans un abri, sous ce ciel de glace. Notre colonel (Romme) donne l'exemple. Nos chirurgiens, n'ayant plus leurs paniers d'ambulance, abandonnés à Smolensk, faut de moyen de transport, reçoivent des mains de tous des chemises, des mouchoirs, tout ce qu'on peut donner. J'avais remarqué près de nous un parc d'artillerie (...). J'y courus, et, m'emparant d'une couverture placée sur le dos d'un cheval, je revins à toutes jambes la porter à Louise. J'avais commis une mauvaise action, mais je savais que Dieu me le pardonnerait en faveur du motif.
J'arrivai au moment où notre cantinière mettait au monde, sous un vieux chêne, un enfant mâle bien constitué, que je rencontrai en 1818 enfant de troupe dans la légion de l'Aube. Ainsi notre brave Louise donna un défenseur de plus à la Patrie dans l'un des moments les plus critiques où se soient trouvés les débris de la Grande Armée."
(PP. 405-406).

- "Le 29 novembre, nous nous présentions à l'entrée des ponts, et j'ai vu, à ce moment, de mes yeux vu, un spectacle d'une telle horreur, qu'après cinquante ans, ma plume peut encore à peine le reproduire. Une masse de malheureux, officiers et soldats de toutes armes blessés, employés, femmes, enfants, en proie au froid, à la faim, auraient pu passer, la veille, sans encombre, mais rien n'avait pu les arracher des feux autour desquels ils reprenaient un peu de vie. Ils se pressaient maintenant pour franchir les ponts. Aux abords de ceux-ci, les cadavres de ceux de cette lamentable foule qui avaient déjà succombé pendant la nuit, avaient été foulés aux pieds par la cavalerie et l'artillerie. On voyait des têtes, des bras, des jambes épars, une boue sanglante !!!"

(P. 406).

Peter von Her, 1843 (DR).

Le lieutenant Danel,
24 ans,
ne pense plus qu'au suicide...

- "J'étais seul (2) au milieu d'une multitude égarée et affamée, ne pouvant me soutenir à cheval tant j'étais faible par suite d'une maladie des entrailles, étant obligé de m'y maintenir sur le ventre, les bras d'un côté, les jambes de l'autre, laissant à ma monture le soin de suivre à sa volonté la colonne de soldats sans armes et démoralisés, au milieu desquels je passai une cruelle nuit, tant bien que mal, ne pouvant que parler inintelligiblement.
(...) Succombant à l'influence de sinistres pensées, je m'arrêtai, déterminé à mettre fin à une si pénible situation. Assis sur un tertre, au bord de la route, les rênes de mon cheval passées dans le bras gauche, un pistolet armé dans la main droite, j'attends pour exécuter mon projet de destruction que des voltigeurs qui faisaient l'arrière garde eussent défilé.
(...) Mes larmes coulèrent.
Déjà les lances des cosaques apparaissaient sur le monticule qui dominait la route et qui se trouvait à trois ou quatre portées de mousquets de moi; je les voyais arriver avec calme et résignation, ne voulant accomplir mon oeuvre que lorsqu'ils seraient à dix pas.
Tout à coup, un colonel descendant de ce monticule au galop, m'apercevant dans une complète immobilité se dirige vers moi et s'écrie :
- Que faites-vous là, Monsieur l'officier ? A cheval ! Vite à cheval !
Je l'examine sans bouger et reconnais le brave colonel Robert, aide de camp du général Belliard (3). Il me reconnaissait lui-même et me dit en apercevant mon pistolet dans ma main :
- Qu'alliez-vous faire, malheureux ?
Il avait deviné mes intentions.
- Ah ! C'est affreux, vous, Daniel, un brave soldat qui avez fait preuve de tant d'énergie et d'abnégation, finir ainsi votre honorable carrière. Ah ! C'est indigne de vous..."
(PP. 410-411).


Fuite de Napoléon quittant les restes de son armée à Smorgoni (DR).

NOTES :

(1) Vincent Bertrand (1786-1864) entra en 1805 au 7e régiment d'infanterie de ligne dont il portera l'uniforme jusqu'en 1815. Il terminera sa carrière militaire en 1838 avec le grade de capitaine du 43e RI.
La première publication de ses Mémoires remonte à 1909.

(2) De prénom inconnu, Danel est entré à l'armée en 1806 dans les gendarmes d'ordonnance à cheval de la Garde impériale. En 1812, il est lieutenant au 9e régiment de hussards. Il participera à la bataille de Waterloo comme aide de camp du général Lebrun. Sa mort interviendra après 1854.
Il faudra attendre 1952 pour que son témoignage soit enfin publié pour la première fois (Carnet de la Sabretache).

(3) Augustin-Daniel Belliard (1769-1832). Premier ambassadeur de France à Bruxelles après la révolution belge de 1830.
La rue portant son nom ne laisse pas que de bons souvenirs aux enseignants francophones du Royaume de Belgique.

A noter que Chantal Serrière a consacré l'une des dernières pages de ses "Ecritures du Monde" à l'Histoire d'un conscrit de 1813, roman d'Erckmann et Chatrian. 


.

jeudi 24 novembre 2011

P. 92. Les libertés de Danielle Mitterrand

.

France Libertés :

- "Agée de 87 ans, Danielle Mitterrand a porté jusqu’au bout ses idées. Elle fêtait le mois dernier le 25è anniversaire de sa Fondation entourée et écoutée, pour son plus grand bonheur, de nombreux jeunes.

Celle qui se reconnaissait dans les mots de Jean Paul Sartre "Il n’est pas juste de vouloir traiter les souffrances des hommes sans sʼengager dans la lutte contre les causes même de ces souffrances" avait créé France Libertés pour toujours rester à lʼécoute des peuples et de leurs droits et retransmettre leurs attentes.

De la résistance à la libération de Nelson Mandela en passant par le soutien du peuple Kurde ou la défense du peuple tibétain, Danielle Mitterrand a ainsi marqué son époque par sa ferveur et son énergie.

Inlassable militante, l’accès à l’eau pour tous était devenu, ces dernières années, au centre de son action et lʼobjectif de toute une vie.

Malgré son départ, Danielle Mitterrand nous laisse un message d'espoir, qui montre la voie d'un monde plus juste aux générations qui inventeront le monde de demain.
"Nouveaux résistants à l’ordre néolibéral, bâtisseurs d’un monde où chacun trouve sa part de vie, de liberté et d’action, expérimentateurs de solutions alternatives aux problèmes du temps... Qu’ils se rassemblent, s’unissent, fusionnent partout dans le monde pour mettre un terme à la dictature économique et financière, suppôt des dictateurs politiques. Celles-ci semblent être, enfin, ébranlées par la colère des peuples. C’est heureux mais ce n’est qu’un début. Je souhaite de tout cœur que nos propositions en faveur des biens communs du vivant soient comprises de tous et participent à l’urgente et indispensable métamorphose de la société humaine vers une nouvelle civilisation".
(22 novembre 2011).

Danielle Mitterrand, En toutes libertés, Ramsay, 1996, 351 p.

Seuls quelques "esprits" chagrins s'attendront à respirer ici des parfums d'encens et à lire quelques lignes d'un panégyrique plus ou moins hypocrite.

Mais quel cinéaste aurait osé, pour une fiction, filmer la séquence suivante ? 
Contexte : une France où beaucoup à droite se refusent même à envisager comme banalement démocratique une alternance avec la gauche. Images : 10 Mai 1981 en début de nuit. Le premier socialiste élu président d'une 5e République jusque-là chasse gardée, monte vers Paris. Au volant, son chauffeur éprouve des problèmes avec les essuie-glaces. Il n'a pas de permis de... conduire et n'en possèdera jamais. Des gendarmes à moto encadrent la voiture. A l'arrière, l'épouse de l'élu. Elle s'était rêvée institutrice, la voici première dame de France. Danielle chante... l'Internationale

L'Internationale se fait rare. Danielle Mitterrand n'est plus. 
Mais avant de se taire, elle retraça elle-même son itinéraire de libertés voulues et assumées et si possible, partagées, dans un livre publié en 1996 chez Ramsay.

4e de couverture :

- "1939 -1940 : c'est la drôle de guerre. J'ai quatorze ans. Ma poitrine bat la chamade : « Et je serai à Huez. Heureux si vous le voulez, malheureux s'il vous plaît. » Le coeur chavire, je lis et relis ce message. En cette année-la le monde gronde et vacille. Et moi, j'étais cette jeune fille en fleur et je croyais être amoureuse !"

C'est le début du récit que Danielle Mitterrand fait de sa vie : ses émois d'adolescente très vite balayés par la tourmente de la guerre, son engagement auprès de ses parents dans le maquis, sa rencontre avec un homme fascinant, François Mitterrand alias Morland pour la Résistance, leur mariage follement accéléré dans la joie de la Libération…

Danielle Mitterrand raconte son itinéraire de jeune épouse, de mère, puis de première dame de France - un destin de femme marqué par son attachement à un homme politique exceptionnel, par les rêves, les idéaux, les victoires et les revers partagés - ses rencontres avec les grands témoins et acteurs de l'Histoire de ces dernières décennies.

Elle se livre tout entière aussi dans son autre combat, comme présidente de la fondation France Libertés, sur le terrain humanitaire et partout où les Droits de l'homme sont menacés, aux côtés des Kurdes, du Dalaï-Lama, de Nelson Mandela ou de Fidel Castro, fustigeant la politique de tout gouvernement si sa conscience de femme libre le lui dicte.

Un destin et une mémoire hors du commun."

Danielle Mitterrand (Graph. JEA/DR).

Comme des pétales ou des épines d'une même (p)rose, voici quelques pages des mémoires de Danielle Mitterrand.

Bac Philo :

- "Le bac, je n'y pensais plus guère... pourtant la convocation aux examens arrive. C'est pour le 6 juin [1944].
Imaginez-moi, le jour du Débarquement, dans une salle du lycée Saint-Rambert à Lyon. Je dois plancher sur la psychologie, la morale, la logique ou l'empirisme (...). J'opte pour l'empirisme, seulement j'ai la tête ailleurs. Je me demande ce que font les maquisards ; cette nuit les affrontements ont été sérieux... Combien de blessés, je ne veux pas penser aux morts. Et que se passe-t-il en Normandie ce jour J ?
Je finis par rendre une copie.
Quel n'est pas mon étonnement de trouver à la sortie un agent de liaison du réseau. Il m'entraîne rapidement vers un train pour me soustraire à une arrestation probable (...).
Plus d'examens, plus d'épreuves scolaires. Je gagne un endroit plus discret. Ma vie d'étudiante tellement chaotique est finie. Je n'aurai jamais mon bac philo...
Le maquis de Cluny est très actif. Alimenté en armes par les Américains, il est codirigé par un Anglais et notre chef, Jean-Louis Delorme."
(P. 59).

Pendant la IV" République :

- "J'ai le souvenir d'une soirée officielle [à l'Elysée, F. Mitterrand est ministre] pour laquelle Madeleine Vramant, grand couturier de l'époque, me prête une robe du soir, un fourreau extrêmement moulant. Elle est magnifique, seulement, impossible de s'asseoir. Pour un dîner, c'est un vrai problème.
Tant pis, un petit mot : "Avec nos regrets de ne pouvoir assister, etc., etc." adressé par porteur à l'Elysée. François retire son smoking, je me défais de ma jolie robe de mannequin. "Et si nous allions au cinéma ?" Dans le quartier, on joue Jour de fête de Tati. Quel film idéal pour oublier..."
(P. 157).

Mitterrand n'a pas "fini de la découvrir" :

- "Je vois bien aussi que mon mari excelle dans les exercices de séduction (...). Au fil des années, plutôt agacée, je n'en suis pas atteinte outre mesure. Epouse et mère de ses fils, fidèle au poste, il n'a pas fini de me découvrir (...).
Finalement un peu lassée de ces jeux d'esprit, de situations quelques fois surréalistes... notre vie commune a pris un autre sens, plus solidement ancré à la famille. Lorsque l'on est foncièrement attachés l'un à l'autre et que l'on désire profondément rester ensemble, vivre des amours séparées n'est pas inconcevable.
La naissance de Mazarine n'a été ni une découverte ni un drame pour moi : je l'ai assumée."
(P. 115).

10 mai 1981 :

- "Premier indice du changement dans notre ordinaire : nous passons gratuitement le péage. Les motards de la gendarmerie nous attendent, ouvrent la route, entourent la voiture, et nous entrons dans Paris flanqués d'une escorte.
C'est au PS que nous arrivons en cet équipage et retrouvons une euphorie peu commune dans ce parti plutôt chagrin même les jours de victoire.
Paris s'électrise sous l'orage qui éclate et les rues sont parcourues par de joyeux fêtards qui manifestent avec exubérance leur joie.
"Tous à la Bastille !" Je veux me joindre à eux et faire la fête ; je m'apprête à suivre mes fils. "Non, madame la présidente, sécurité oblige, vous devez rester à la maison."
Et c'est ainsi que j'ai passé cette première nuit dans mon lit alors que, pour tant de Parisiens, ce soir, ce fut un 14 juillet..."
(PP. 136-137).

L'associatif :

- "Dans le milieu associatif, nous sommes nombreux à redouter cette montée d'un conservatisme nationaliste égocentrique, fermé à tout ce qui n'est pas français. Le monde peut s'écrouler, qu'importe, si la France s'enrichit, garde ses privilèges (...), ses marchés et ses vertus. Dormez paisiblement, bons Français : la maison sera bien fermée, les frontières bien gardées. On est entre nous, ne craignez plus rien.
Seulement le monde évolue autour de nous et sans nous ; certains ne s'en aperçoivent pas, trop occupés à contempler leur nombril."
(P. 151).

Signature au bas d'une lettre en date du 6 janvier 1996 (Doc. JEA/DR).

Après l'attentat perpétré contre elle au Kurdistan :

- "J'aimerais leur faire partager l'émotion qui m'a envahi l'âme lorsque, après l'attentat dirigé contre moi au Kurdistan irakien en juillet 1992, des victimes m'accueillirent à l'hôpital, me tendant les bras et murmurant : "Grâce au Ciel, vous êtes indemne, vous n'avez rien. Merci pour ce que vous avez fait pour témoigner de notre malheur et pour nous aider à vivre."
Cette générosité de coeur me confond.
Que dire... Ce gosse dont j'ai caressé la joue à l'hôpital de Sulaymaniyya, éventré par l'éclat de la bombe qui devait m'atteindre, lui seul pourrait exprimer ce que j'ai lu d'incompréhension dans son regard (...).
Je n'en ai jamais parlé encore parce que c'est inénarrable."
(PP. 174-175).

Le Che et José Marti :

- "Lequel de ma génération et de celle de mes enfants n'a placardé dans sa chambre les grands portraits du Che ? Tout en cheminant, seules les effigies de ce grand révolutionnaire attirent le regard. Ou encore placardées sur les murs les grandes pensées de José Marti (écrivain, penseur politique et philosophe reconnu de toute l'Amérique latine et des Caraïbes); on peut lire notamment : "De toutes les tâches de l'homme, la plus magnifique est d'éteindre la nuit."
(P. 252).

Autres livres sur les rayons de la bibliothèque de ce blog ? Cliquer : ICI.


lundi 21 novembre 2011

P. 91. Levons nos verres à la santé de J-C Pirotte et d'Apollinaire...

.
Apollinaire - Jean-Claude Pirotte (Mont. JEA/DR.) 

Le Monde :

- "Le prestigieux prix Apollinaire, considéré comme le "Goncourt de la poésie", a été attribué à l'auteur belge Jean-Claude Pirotte pour ses recueils Cette âme perdue (Castor astral) et Autres séjours (Le Temps), ont annoncé lundi 14 novembre les organisateurs du prix.
Agé de 72 ans, Jean-Claude Pirotte a publié une cinquantaine de livres, des articles, des poèmes et des préfaces. Peintre, il a aussi illustré différents ouvrages. Parmi ses derniers livres parus figurent Un voyage en automne, Absent de Bagdad, Passage des ombres, Le Promenoir magique et autres poèmes (La Table Ronde) ou encore Expédition nocturne autour de ma cave (Stock).
Le prix Apollinaire n'est que le dernier d'une longue série de récompenses. Jean-Claude Pirotte a notamment obtenu le prix Marguerite-Duras en 2001 pour Autres arpents, le prix Valéry-Larbaud en 2001 pour Ange Vincent, le prix des Deux-Magots en 2006 pour son roman Une adolescence en Gueldre (tous parus à La Table Ronde), le prix Maurice-Carême pour Revermont (Le Temps qu'il fait, 2008) et le prix Kowalski, prix de poésie de la ville de Lyon, en 2008."
(15 novembre 2011)
Les liens ne figurent pas dans l'article du Monde (1) mais vous sont proposés par ce blog.

Le Magazine Littéraire : 

- "Fondé en 1941 par Henri de Lescoët, le prix Apollinaire est l'une des principales récompenses du monde de la poésie francophone. Parmi ses anciens lauréats figurent notamment Hervé Bazin, Léopold Sédar Senghor, Vénus Khoury-Ghata ou encore Jean-Vincent Verdonnet.

Cette âme perdue, Le Castor Astral, 2011, 98 p.
Autres séjours, Le Temps qu'il fait, 2010, 189 p.

Jean-Claude Pirotte et Cette âme perdue :

- "Cette suite de poèmes dont le titre est évidemment un hommage à Valéry Larbaud s’apparente, comme de plus en plus souvent dans mon travail, au journal intime, encore que disposé, conçu pour la publication. Le carnet intitulé Cette âme perdue a été ouvert le 20 février 2010 près de la mer du Nord, et ses dernières pages datent de fin avril 2010, alors que je retrouvais la parole
après une assez courte mais douloureuse hospitalisation. Ces poèmes assez brefs, dénués de toute ambition novatrice, écrits au jour le jour, témoignent de ce que, dans Alma perdida, Valéry Larbaud évoque : “poésie de choses banales … / Hauts et bas du temps et du tempérament”. 

Autres séjours, 4e de couverture : 

- "Autres séjours fait suite à Revermont.
Aux images du Jura se substituent peu à peu celles des abords de la mer du Nord, où séjourne l'auteur. Comme Revermont, Autres séjours évoque, à la façon d'un journal en poèmes, le paysage intime qui s'assombrit, alors que la lumière marine l'éclaire d'un halo crépusculaire. Mais ce n'est pas tout : un prochain volume suivra, intitulé Le très vieux temps, où l'enfance rejoint et apaise le grand âge.
La vie n'a pas de fin, même si le monde et la littérature agonisent. 
Ce n'est pas la fin du monde
comment exprimer la fin
de ce qui n'existe pas
nous séjournons dans le songe
le cauchemar et le sommeil
nous séjournons dans la vie
qui n'est jamais la vie
mais un vide au coeur du temps
un désert empli d'espace
mais d'un espace désert
nous séjournons loin de nous
pour être en pleine lumière."

Signature de Jean-Claude Pirotte (DR).

Jean-Claude Pirotte pourrait ressembler à un général d'opérette
avec tous ses prix épinglés sur la poitrine
mais c'est un des poètes les plus singuliers, les plus rares...

Il est le seul contemporain dont je tentai, un printemps hésitant puis un été où le soleil éclatait de santé, de suivre vraiment les traces. En Bourgogne mais aussi vers les Montagnes Noires. Non seulement parce nous sommes du même "pays", nous croisant avant ses départs toujours répétés. Mais parce que notamment son Mont Afrique (2) m'appela à parcourir bouquin en main les environs des sources de la Meuse et les vignobles s'attaquant à un monticule étonnamment épargné en région dijonnaise. Pour traverser peut-être des miroirs proches des siens. S'accouder aux mêmes comptoirs. Ecouter-regarder des anonymes (pas tous alcooliques). Déplier des journaux qu'il ne viendrait jamais à l'idée de lire ailleurs. Sur un coin de table douteuse, écrire des cartes postales sans même une rature, pour qu'elles deviennent un coin de mémoire. Reprendre un dernier aligoté non pour la route mais pour les chemins des écoliers fugueurs (3).
Jean-Claude Pirotte : je tentai même d'illustrer ses vers-tiges. Des essais pour lesquels je n'éprouve aucune honte car tous disparurent lors d'un avant-avant dernier déménagement...

"Vienne la nuit, sonne l'heure, les jours s'en vont"... l'oeuvre de Jean-Claude Pirotte demeure. Grâce au prix portant son nom, Apollinaire est rejoint par un fameux compagnon de libations. Tandis que les yeux fleuris, ils compareront joyeusement et dégusteront rêveusement quelques nectars, voici un abécédaire de mes citations préférées. Il n'y a pas d'heure pour savourer du Pirotte !

 Absence

- "Je titube dans le labyrinthe de l'absence." 

Adolescent :

- "Privilège de l'adolescent : écrire dans la grâce de l'imparfait."

Ame :

- "L'âme serait cette vapeur moite qui flotte dans le petit matin, avant de disparaître au bout de l'enfer." 

Bistros :

- "Au bistro, il y a des les gens qui se préparent à vivre, et ceux qui se préparent à mourir. Souvent, ce sont les mêmes." 

- "Les bistros, c'est mes vies, mes cinémas, mes églises, mes mosquées, mes propriétés, mes banques, mes lupanars et mes Hespérides."

Désordre : 

- Le désordre est une maladie. Je prétends souvent désirer m'en guérir mais il se peut que je ne sois pas sincère. Le désordre est un signe de vie (la maladie aussi). Il est permis de concevoir l'existence comme une litanie du désordre. Il n'y aurait donc que la mort, ou la prison, qui soient susceptibles d'interrompre la complainte bigarrée des jours anarchiques"

Ecrivain : 

- "Lorsque les gens me demandent si je suis écrivain, je fais le mort."

Existence : 

- "L'on pense avec désespoir, avec ironie, que l'existence n'a pas d'avenir, puisque le passé l'invente à chaque phrase."

Humanité : 

- "La plainte d'une humanité sans parole, que plus rien jamais ne consolera."

Jeunesse :  

- "La jeunesse s'obstine encore et toujours à nous adresser des signaux au bord de la nuit." 

Littérature : 

- "La Littérature ne tient qu'à un fil et le fil est absent."

Mer :

- "La mer roule avec une malice redoutable les galets et les mâche et les remâche (on pense à Démosthène)."

Monde :  

- "Nous sommes au monde sans voir le monde." 

Mort : 

- "La mort nous a quittés avec les premières passions amoureuses et les floraisons des bruyères d'automne, un matin de brume rayonnante, aux confins de l'enfance et de la terreur."

- "La mort a de longtemps entrepris son travail de subversion, elle est en état de mettre sans préavis un terme à cet inavouable chantier clandestin, ce chantier d'effondrement dont mon corps est le siège et l'objet." 

Mot :

- "Tout dire en un seul mot, mais lequel ?" 

Pays :

- "Les pays où l'on peut vivre sont ceux où le regard des femmes attise l'ombre et capte des lueurs imprévues." 

Personnages : 

- "Nous ne sommes que des personnages très secondaires, très effacés, des figurants égarés, mais les figurants sont au monde comme les arbres et les planètes, comme les amours perdues et les corbeaux attentifs."

Romans :

- "Je ne peux pas écrire de romans, parce que des romans, je n'arrête pas d'en vivre." 

Seul : 

- "On est tellement seul qu'on ne peut compter que sur l'autre."

Temps :

- "Le temps se retourne comme une veste.
Une de ces formules affectées qui font de moi ce que je parais, jamais ce que je suis." 

Trésor :

- "Il n'y a de trésor que perdu." 

Vagabondage :

- "J'aurai beaucoup vagabondé. Loin du pittoresque aguicheur et des intentions louables." 

Vie : 

- "Je ne suis que la créature ignorée d'un romancier prodigue (Dhôtel, Audiberti, Queneau ?), ce n'est qu'à ce titre que je me trouve en vie."

- "Notre existence entière ne suffit pas à raconter la vie, à l'inventer, encore moins à la séduire." 

Vin : 

- "Le vin est un breuvage douteux, sacerdotal, et impératif. Il est, pour parodier irrévérencieusement Nerval, "l'épanchement du songe de la vie".

Illustration par Jean-Claude Pirotte (4).

NOTES :

(1) Il n'y aura pas de surprise, Le Monde omet nombre des prix remis en Belgique dont :
- 1963, Prix Frans De Wever, attribué par l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique.
- 1986, le Prix Victor Rossel, le plus important prix littéraire belge.
- 2010, Grand Prix de la Maison de Poésie de Namur.

(2) Mont Afrique, Le Cherche-midi, 1999, 140 p.

(3) Jean-Claude Pirotte :
- "Ce n'est pas Jean Sébastien qui m'a appris l'art de la fugue."

(4) Illustration pour la couverture de La pluie à Rethel, La Table ronde, 2002, 174 p.

Pour ouvrir la bibliothèque de ce blog, cliquer : ICI.



jeudi 17 novembre 2011

P. 90. Jules Beaucarne sur l'île aux trésors de Colo

.
(Ph. JEA/DR).

Quelques pages de ce blog sont inventées, rédigées, illustrées par des auteurs-compositeurs (masc. gram.) "venu(e)s d'ailleurs" et invité(e)s ici...

voici les Espaces, instants de Colo. 

Sur son île, Colo.

Quand le dernier bateau du soir quitte la terre supposée ferme, l'île redevient enfin elle-même. Ses parfums perdent leur réserve. Les lumières cherchent les nuances les plus farfelues sans crainte d'être pourchassées par des armées de photographes. Les rires des enfants annoncent les prochaines étoiles. Les livres sortent des rangs imposés par les bibliothèques-casernes. Des flâneurs commencent à ressembler à de chouettes silhouettes. Et si les arbres referment leur manteau d'écorce, c'est seulement pour y retenir la chaleur du soleil parti farfouiller derrière un autre horizon.
Colo se penche sur son blog comme une orfèvre sur son maître d'oeuvre. 
Cette étrangère venue des brumes étranges du nord, permet à son ordi d'échapper à tous les ordinaires, tandis que des vols entiers d'oiseaux migrateurs-milecteurs y trouvent des espaces et des instants de grâce.
Elle n'a pas détaché cette page 90 de ses Espaces et de ses Instants mais elle l’a patiemment ciselée et illustrée et mise en musique pour nous l’envoyer confiée à une bouteille jetée à la mer. Avec pour seule étiquette : "Aux lectrices et aux lecteurs de Mo(t)saïques 2 : cadeau !"...

Premières chansons de Julos Beaucarne (DR). 

Présenté par Colo :

Julos Beaucarne conteur, poète, comédien, écrivain, chanteur, sculpteur. Tout ça ! 

Comment en parler alors si ce n’est « à tort et à travers », formule qu’il emploie pour parler de l’amour ?
Il vit à Tourinnes-la-Grosse, en Brabant Wallon, Belgique.
A signaler que chaque année en novembre, à la Saint Martin, on peut visiter en face de la ferme de Wahenge, Tourinnes la Grosse, ses sculptures post-industrielles faites d’objets de récupération, regardez, c’est impressionnant !

Photo JM Prod sur "le site terriblement officiel de Julos". Cliquer: ICI.

Photo Laurence Latour sur le site de Julos Beaucarne. Cliquer : ICI.

L’œil clair, les longs cheveux blancs soulignés par ses pulls et foulards rouge/rose/ orange, et dans le visage une immense tendresse qui fait fondre illico tout flocon d’agressivité, voilà tel qu’il se présente, qu’il s’est toujours présenté.

Son amour pour l’humanité et la nature, il le dit, le répète sur tous les tons, sans répit depuis plus de quarante ans avec la douceur des sages et la ténacité de Gandhi. 

Autres œuvres, originales à souhait et à voir comme autant d'objets détournés en cliquant : ICI.

Le mieux est de le laisser parler, chanter.




Engagé depuis toujours dans la lutte contre les nuages-tueurs,  cette chanson se trouvait déjà sur son album : « Front de Libération des arbres fruitiers » 1974.

« Je me souviens c'était en 2011, j'avais presque septante cinq ans, soixante quinze ans comme vous autres vous dites, un ami a frappé à ma porte,  je lui ai ouvert, il était tout en affaire comme on dit chez nous, inquiet, nerveux, essoufflé : 
- " Regarde vite la télé, le réacteur d'une centrale nucléaire a sauté au Japon ".
Alors je me suis souvenu du vieux poète Turc Nazim Hikmet et de son poème "Que les nuages ne tuent pas les hommes "

Source : ICI. 

Et encore : un superbe texte, écrit par lui bien sûr, un texte qui nous incite à la liberté…écoutez :



En 1975 il vit un immense malheur: sa femme est assassinée par un déséquilibré. Le soir même il écrit une lettre admirable.

La voici lue avec émotion par Claude Nougaro :



Terminons en poésie…



…puis voici son adaptation d'un poème de Shakespeare, en finale de la pièce Peines d'Amour Perdues, Love's Labour's Lost.



NB : Vous trouverez tout et plus encore sur le site « très officiel » de JB.
Cliquer ICI.

Et sur son blog : Julosland

.



lundi 14 novembre 2011

P. 89. Novembre 1993 sous la plume de Françoise Giroud

.
Françoise Giroud, Journal d'une Parisienne, 1993, Seuil, 1994, 429 p.  (1)
et
Points, 1995, 395 p.
(Mont. JEA/DR).

Françoise Giroud : 

- "Les jours fuient, par où les saisir ? Sur la peau glissante de l’actualité, se mêlent l’insignifiant et le majeur, parfois indiscernables sur l’instant, les hommes, les choses, les humeurs, les impressions fugitives, les émotions fugaces, la couleur du temps…

L’année 1993 a été féconde en événements qui lui ont donné sa physionomie particulière. Ce Journal ne prétend pas donner la synthèse, au contraire. C’est une série d’instantanés que je me suis astreinte à prendre chaque jour, sans tricher, et où j’espère seulement avoir rendu le reflet du mouvement de la vie tel que je l’ai perçu, moi, parisienne privilégiée mais attentive au tumulte des choses sous leur écume."
(4e de couvberture).

Laure Adler : 

- "Son encyclopédisme, son goût de lire, sa manière de retenir, d'un coup de griffe, l'écume du quotidien donnent l'idée à Michel Winock de lui confier un journal, sorte de continuation, en somme, de ses éditoriaux. Et c'est un délice, encore aujourd'hui, que de se plonger dans ce Journal d'une Parisienne, où coexistent le journal intime, la réflexion sur la vieillesse, les indignations politiques, telles quelles sont vécues au jour le jour. Elle qui n'a jamais tenu de journal intime de sa vie s'astreint à écrire trois heures par jour, sans rien relire ni modifier, en prenant le risque de se tromper..." (2).

D'après l'affiche du film de Damian Pettigrew : "Fellini, je suis un menteur" (DR).

Françoise Giroud :
"La jeunesse, tant qu'elle ne casse pas, on la laisse braire."

Lundi, 1er novembre 1993.

- "La mort de Fellini, plongé depuis deux semaines dans le coma, est un grand malheur. Personne n'est irremplaçable ? Si, les artistes.
(...) L'idée de devenir un monument l'affligeait. "Un monument, c'est immobile et les pigeons se posent dessus..." Héla, c'est fait. Le voilà figé dans sa gloire, qu'il ne partageait avec personne.
Si fécond en d'autres temps, le cinéma italien a dépéri, rongé par la télévision, que Fellini haïssait. Danielle Heymann  rapporte, dans Le Monde, ce qu'il lui en disait : "La réalité, la tragédie, la vie n'apparaissent plus qu'à travers le petit écran, n'existent plus hors du petite écran. (...) La télévision a mutilé notre capacité de solitude, a violé notre dimension la plus intime, la plus privée, la plus secrète. Enchaînés par un rituel envahissant, nous fixons un cadre lumineux qui vomit des milliards de choses s'annulant les unes les autres dans une spirale vertigineuse. "
(P. 354). 

Lundi 8 novembre.

- Pierre Mehaignerie a fait voter une loi qui rend incompressible la peine de prison à perpétuité, appliquée à des meurtriers de mineurs... 
(...) Ceux qui subiront cet enfermement à vie ne sont certes pas des objets de compassion. Ce sont des hommes qui ont commis des crimes affreux... Il ne s'agit donc pas de s'attendrir sur leur sort. Simplement, a-t-on le droit de priver un être humain de toute espérance ? A tout jamais ? Que le chef de la démocratie chrétienne en France ait pris l'initiative d'une telle loi laisse songeur..."
(P. 360).

Mardi 9 novembre.
 
- "Le Manifeste pour la parité entre hommes et femmes dans les assemblées élues est publié par Le Monde, avec 577 signatures. Utopie ? Il y en a de plus folles qui se sont réalisées."
(P. 362).


3 volumes dans la collection Bouquins, chez Laffont, 1993 (DR).

Mardi 16 novembre :

- "Du pognon pour l'éducation !" criaient les manifestants. Ce n'est pas précisément une revendication révolutionnaire. Plutôt un cri de détresse devant l'absence de locaux, l'absence de maîtres, les filières surchargées... Ils ont envie de travailler, ces enfants, aujourd'hui et demain.
Les écoutera-t-on ? Pour être entendu, en France, aujourd'hui, il vaut mieux être agriculteur et mettre le feu aux préfectures. La jeunesse, tant qu'elle ne casse pas, on la laisse braire."
(P. 368).

Mercredi 17 novembre :

- "Le clown Zavatta s'est tué, à 78 ans, d'une balle dans la tête. Cancer. Il souffrait. C'était si beau, le cirque, autrefois. Le bruit, l'odeur, les paillettes, les exploits... Et puis la télévision est arrivée." 
(P. 370).

Mardi 23 novembre :

- "Relu pour le JDD, une bonne partie des Mémoires de Casanova, dont la première édition enfin conforme à l'original vient de paraître, après des tribulations dignes de celles de l'auteur.
Derrière sa légende de séducteur professionnel, le personnage apparaît dans toute sa stature. Charlatan, aventurier, joueur, escroc de haut vol, espion de Louis XV, mais aussi docteur en droit, traducteur d'Homère, auteur d'une Histoire des troubles de la Pologne en sept volumes, fréquentant les cours et les bouges, les princes et les cachots, fabuleux Casanova.
Qu'avait-il donc, ce fripon vénitien, pour que les femmes tombent dans ses bras ? Glouton du sexe ? Don Juan au coeur de pierre ? Nullement. Il les aimait tout simplement."
(P. 376).

Signé Alechinsky, timbre émis le 28 septembre 1992 (JEA/DR).

Jeudi 25 novembre :

- "Berlusconi, avec son empire financier, ses journaux, ses télévisions obscènes, c'est une puissance. Qu'il la mette au service des néo-fascistes - alors qu'il était, de surcroît, le plus ferme soutien des socialistes ! - achève de rendre l'homme peu recommandable...
Les Italiens ont-ils fait leur révolution pour se donner à des Berlusconi ? Ce serait un beau gâchis."

Vendredi 26 novembre :

- "Pendant que Franco agonisait, ses ministres étaient réunis en un conseil qui siégeait sans désemparer. De temps en temps, quelqu'un se levait pour aller aux nouvelles. Enfin, l'un d'eux revint pour dire : "C'est fini." Il y eut un long silence. Puis une voix demanda : "Qui va le lui annoncer ?" Si non e vero..."
(P. 378).

Dimanche 28 novembre :

- "Vente aux enchères de peinture contemporaine (...). Un petit Alechinsky rose me tape dans l'oeil. S'il reste dans mes prix, je vais succomber. L'épatant, avec la peinture, c'est que le désir n'est jamais exténué (...). Et c'est le désir qui vous tient vivant."
(P. 380).

Note 2. Mon bon souvenir à la Librairie Regain, place de la Libération à Reillanne (DR).

La télévision corned beef. 
Aucune société se bien disant civilisée ne devrait imposer des pertes de liberté synonymes de perte de la dignité humaine.
La parité femmes-hommes comme un mirage sur un horizon ne cessanr de reculer.
L'enseignement maltraité comme une sorte de poubelle de la société.
Berlusconi confondant la politique avec un plat de macaroni.
Franco la muerte remplacé par d'autres dictateurs ailleurs...
Françoise Giroud tenait un journal en 1993. Avec le recul, nous ne pouvons que constater combien l'histoire est parfois un fleuve pris par bien des glaces...

NOTES

(1) Les extraits repris sur ce blog portent la pagination de l'édition originale.

(2) PP. 455-456 in Laure Adler, Françoise, Grasset, 2011, 493 p.

Pour parcourir la bibliothèque de ce blog, cliquer : ICI.



jeudi 10 novembre 2011

P. 88. Aucun de ces chemins ne mène à Rome

.

Le Contadour (Ph. JEA/DR).

Album photos : 9
pour de nouveaux vagabondages,
échanger sa route contre rien...

quand se confondent destins et destinations, 
quelques étoiles oublient de s'endormir aux embranchements de la forêt jamais noire

fausses routes pour mieux écarter les collectionneurs de feuilles jouant comme des enfants dans les fondrières, sans jamais imaginer - même dans leurs pires cauchemars - que des fourches peuvent les clouer au flanc d'une colline

les chemins de halages sont des impasses pour les grenouilles voulant se transformer en boeufs muets

quelques passages ne le sont pas - sages -; que du très beau contraire

ces roulotes préfèrent emprunter des pattes-d'oies plutôt que des carrefours commerciaux (elles empruntent, mais contrairement aux préjugés sur les gens du voyage, elles les rendent...)

gare au terminus d'une vie mise sur les rails d'un train-train quotidien

les zigzags perturbent profondément ceux qui prennent les voyages pour des autoroutes de la désinformation...

Entrée de Manne, en venant de Manosque (Ph. JEA/DR).

La Gabelle, il venait de neiger sur le Ventoux (JEA/DR).

Beaumont pendant la sieste (JEA/DR). 

A la recherche de cerisiers en fleurs vers Irancy (Ph. JEA/DR).

Chiroubles (Ph. JEA/DR).

Route éponge à Thel (Ph. JEA/DR).

Allée du château de Modave (Ph. JEA/DR).

Autoroute dite des "Anglais", photo qui n'est pas sans rappeler les reportages de Dominique Hasselmann (Ph. JEA/DR).

Vers Martigny,  (Ph. JEA/DR).

Route de Cendron (Ph. JEA/DR).

Forêt de Saint-Michel en Thiérache, trève entre deux croisades menées par ces chasseurs affirmant protéger la nature à coups de pétoires (Ph. JEA/DR).

Le Gratte-Pierres aux premières neiges (Ph. JEA/DR).

Signy-le-Petit (Ph. JEA/DR).

Envie de parcourir d'autres pages dans l'album photos de ce blog ? Cliquer : ICI.