MO(T)SAIQUES 2

"Et vers midi
Des gens se réjouiront d'être réunis là
Qui ne se seront jamais connus et qui ne savent
Les uns des autres que ceci : qu'il faudra s'habiller
Comme pour une fête et aller dans la nuit ..."

Milosz
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jeudi 5 septembre 2013

P. 263. Le 6 septembre 1954 : La Strada bouleverse la Mostra de Venise...


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L'un des dix films les plus éblouissants de l'histoire du cinéma ?
A noter que son titre français : "Le grand Chemin" s'est perdu dans les sables du temps, même si André Claveau en fit un titre de chanson.(DR)

Synopsis

- "Zampanò, un homme à la nature violente, s’exhibe sur les places et dans les foires de village comme cracheur de feu. A la vue d’une pauvre paysanne submergée par ses enfants, il lui achète Gelsomina pour dix mille lires, une fille ingénue et ignorante pour qu’elle devienne son bras droit dans ses spectacles. Gelsomina, qui sera forcée de devenir sa maîtresse, étant une créature sensible, tente en vain de lui échapper puisqu’il la maltraite sans cesse. Après être passés à un cirque pour y travailler, Gelsomina fait la connaissance de Matto, étrange figure d’équilibriste errant, gentil et placide qui ne rate pas une occasion pour se moquer de Zampanò et l’humilier. Ce dernier va le tuer de manière involontaire lors d’un litige. La tragédie rend Gelsomina définitivement folle car elle va être troublée nuit et jour par le souvenir de Matto. Zampanò alors la quitte pour poursuivre sa vie vagabonde car il craint d’être découvert et arrêté. Quelques années après, il découvre par hasard que Gelsomina est morte et soudainement il prend conscience de sa solitude. Puisqu’il est abandonné par tout le monde pleure sur une plage déserte."

André Bazin

- "C'est l'histoire d'un homme qui apprend à pleurer..."

Jean De Baroncelli

- "C'est un film qui console de bien des déceptions. C'est un film qui nous raffermit dans notre conviction que le cinéma est un moyen d'expression unique."
(Le Monde, 15 mars 1955).

Le Canard Enchaîné

- "C’est un des quatre ou cinq chefs d’œuvre que le cinéma nous ait donnés depuis sa naissance. Un film qui nous force à remettre en question tout ce que nous avons vu au cinéma depuis des années. Une fable humaine et lyrique d’où l’on sort enivré, après quoi le jour même n’a plus la même couleur."
(23 mars 1955).




Yvon Toussaint


- "Fellini traite ce pathétique dans un dépouillement absolu, avec une sainte horreur du pittoresque spectaculaire. Les éléments constitutifs des situations, des images, sont semblables à ceux du néo-réalisme. Mais une infime transposition, une sublimation légère fait naître une poésie douce-amère, tendre et désolée."
(Le Soir, 7 octobre 1955).

Témoignage chrétien

- "La Strada est le chef d’œuvre d’un poète, d’un peintre d’états d’âme ; le chef d’œuvre d’un homme généreux qui, par le don même de sa générosité, provoque la générosité des êtres et des choses ; le chef d’œuvre où la réalité, nourrie et sublimée par la poésie et la spiritualité, est plus réelle que le réel ; le chef d’œuvre où la réalité refuse de se réduire à des symboles tout en étant cependant débordante de signes ; le chef d’œuvre où le quotidien balance dans l’instant du présent au passé, du futur à l’éternel."
(25 mars 1955).

Larousse


- "Les intellectuels, interloqués, ont applaudi, le public populaire, fasciné, a pleuré. Le succès s'est révélé international. Il est au départ de la gloire de Fellini. Aujourd'hui, il se trouve des voix pour prétendre que La Strada est une œuvre surestimée, racoleuse, « facile ». Ces voix s'époumonent en vain contre l'évidence de sa beauté."

Marine Landrot

- "Dépourvu de scénario écrasant, entièrement tourné en extérieur dans des conditions infernales, ce film itinérant vogue au gré de la composition époustouflante des acteurs. Brusque et hâbleur, Anthony Quinn rend caressante sa violence incontrôlée. Avec sa cape de deuil et sa « face d'artichaut », Giulietta Masina oscille entre Charlie Chaplin et Stan Laurel. Roulements de tambour et trépignements : voilà un chef-d'oeuvre."
(Télérama, 20 février 2010).


Anthony Quinn et Giulietta Masina (DR).

L’Oeil sur l’Ecran

- "Le personnage de la jeune fille emprunte visuellement beaucoup de traits à Chaplin ; Giulietta Masima, avec peu de paroles, met beaucoup d’humanité dans son personnage en jouant avec les expressions enfantines de son visage (…). La Strada est un film plein d’humanité que Fellini transmet en évitant tout misérabilisme. Il trouve ici l’équilibre parfait et le film remportera un succès qui le propulsera au devant de la scène."
(Blog écrit à quatre mains par un couple, 13 novembre 2010).


Vittorio Bonicelli


- "Zampanò est l’un des personnages les plus puissants, intenses et dramatiques du cinéma contemporain. Le style du film est parmi les plus purs et les plus lucides du néoréalisme. Il faut se rappeler de la légèreté, de l’intensité, de la chaleur instinctive des personnages et de leur définition immédiate dans la séquence de la réception nuptiale et de l’excursion de Gelsomina dans la grande maison de campagne jusqu’à la découverte de l’enfant malade."
(Il Tempo, 7 octobre 1954).

Leïla Bekhti


- "C'est un film qui m'a bouleversée quand j'étais jeune. Souvent quand on grandit on se dit qu'on n’arrivait pas à mettre de mots sur ce sentiment et des années plus tard, j'ai compris qu'il n'y avait pas beaucoup de gens qui pouvaient autant nous en dire avec leurs yeux et s'appellent de grandes comédiennes, Giulietta Masina en fait partie."
(RTL, 22 août 2013).

Dominique Aubier

- "La Strada est une œuvre qui suppose de la part de son auteur, en plus du génie d'expression, une parfaite connaissance de certains problèmes spirituels et une réflexion sur eux. Ce film traite en effet du sacré, je ne dis pas du religieux ni de la religion. Je parle de ce besoin primitif et spécifique à l'homme qui nous pousse au dépassement, à l'activité métaphysique, tant sous la forme religieuse que maintenant sous la forme artistique, besoin aussi fondamental que celui de durer. Il semble que Federico Fellini sache parfaitement que cet instinct est à la source des religions comme de l'art. Il nous le montre à l'état pur dans Gelsomina. [...] Fellini et ses trois interprètes réussissent à nous décrire tant charnellement que mentalement et par le moyen de l'image, l'histoire servant à un tout autre but, des personnages mythiques et vrais. Ces trois héros vivent d'une vie esthétique parfaite. Ils nous arrachent cette émotion grâce à laquelle un personnage de lumière ou de papier prend pour une seconde une fulgurante réalité et demeure en nous."
(Cahiers du cinéma n°49, juillet 1955).


François Chalais : interview de Giulietta Masina (Festival de Cannes, 1955).

Ermanno Contini

- "Fellini est le maître du récit et son film s’écoule en effet dans une narration légère et très mesurée qui cherche ses retournements de situation, ses rebondissements, ses enchaînements et ses résolutions dans de petits détails, des annotations délicates, des tons discrets qui s’encastrent naturellement dans la modeste trame d’une histoire apparemment vide d’événements. Pourtant, combien d’intentions et d’effervescence enrichissent une aussi grande simplicité, ils sont tous complètement exprimés mais ils ne sont pas tous ni clairement évidents, ni entièrement traduits dans une pleine éloquence humaine et poétique, mais ils sont tous suggérés avec une fine sensibilité, ils sont tous soutenus par une subtile charge émotionnelle."
(Il Secolo XIX, 8 septembre 1954).

Ciné-Club de Caen

- "Séquences célèbres : Gelsomina vendue par sa mère; les trajets sur les routes sur un lamentable triporteur roulotte ; la noce champêtre et la visite d'un enfant malade et reclus ; la rencontre de Gelsomina avec l'équilibriste, puis avec une religieuse dans un couvent ; la bataille de Zampano avec Il Matto qui regarde sa montre brisée et tombe mort ; Zampano qui apprend la mort de Gelsomina, regarde le ciel et pleure sur la plage (…).
Un film complexe. Il était d'abord une critique de la condition féminine, de la femme objet aussi passive qu'un caillou, tout juste créée pour faire l'amour et la cuisine."

Olivier De Bruyn

- "Un film qui témoigne du génie visionnaire de Fellini, mais aussi d'une période transitoire de sa carrière. A mi-chemin des premiers pas néo-réalistes - entrepris avec Rossellini (il collabore aux scripts de Rome ville ouverte et de Paisa, il joue dans l'Amore) puis en solo (les Vitelloni) - et de la fantasmagorie réflexive qui voit le jour à partir de la Dolce Vita (1959), la Strada est d'abord un témoignage d'amour hors-pair à l'actrice Giulietta Masina, madame Fellini à la ville (…).
Fellini filme sa drôle d'histoire comme un road-movie où la réalité patente du monde est doucereusement pervertie par son regard. La Strada est un film où l'on imite les arbres et où l'on avale des spaghettis sur un fil d'acrobate. Un film, aussi, où l'on crève d'aimer. Un grand film."
(Libération, 20 janvier 1995).


Federico Fellini

- "Si j’étais critique, je penserais que chaque film a droit à une façon particulière non seulement d’être vu, mais aussi d’être raconté et donc proposé au lecteur-spectateur. Quel est le but premier d’un critique de cinéma ? Celui de parler d’un film, de le faire « comprendre » (…). Le plus souvent, l’expliquer c’est le réduire sinon même le mortifier, tout comme si face à un conte, on se mettait à dire ce que signifient la forêt, le loup, le Petit Chaperon Rouge et pourquoi Pinocchio rencontre son père dans le ventre de la baleine. Grattez le vernis, vous annulez le charme."
(Il Tempo, 29 mars 1980).

Nino Rota : La Strada, suite (Orchestre symphonique Milan-RAI, dir. Enrico Collina).





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lundi 26 août 2013

P. 260. Le 26 août 1970 : hommage à la femme inconnue du soldat inconnu, acte fondateur du MLF


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L'histoire en marche, leur histoire : celle de la libération des femmes (Graph. JEA/DR).

Quelques militantes féministes choisissent l'Arc de triomphe pour (p)oser la première pierre de leur Mouvement...

Françoise Picq (1)

- "Elles étaient dix ce 26 août 1970 à déposer une gerbe à «la femme du Soldat inconnu», plus inconnue encore que le célèbre soldat sous l’Arc de triomphe. C’est ce jour-là, que les journalistes, copiant le «Women’s Lib» américain, ont parlé pour la première fois en France d’un mouvement qu’ils ont baptisé Mouvement de libération de la femme. Le singulier «la femme» a été réfuté, le mouvement de libération des femmes est alors devenu le MLF. Héritier rebelle de mai 1968, c’est un mouvement d’un type radicalement nouveau, qui s’inventait dans la rencontre des femmes sans prétendre les représenter et refusait d’être représenté par quiconque. Nulle ne devait s’approprier le nom collectif. Les tracts étaient signés «quelques militantes» ou «des militantes du MLF» ; les articles de prénoms ou de pseudonymes (…).
Le mouvement des femmes existait déjà aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, dans les pays du nord de l’Europe… Il fallait bien qu’il arrive en France, sur un terrain fertilisé par mai 1968. Si on considère généralement 1970 comme l’année initiale, c’est que la première publication collective, un numéro spécial de Partisans (mai) titrait - en toute innocence historique - «Libération des femmes, année zéro». C’est aussi que l’année 1970 fut riche en événements et manifestations."
(Libération, 7 octobre 2008).

France Soir

- "Un petit commando en jupons n’a pas réussi à déposer ses fleurs sous l’Arc de Triomphe."
(27 août 1970).

8 mars info

- "Le 26 août 1970, une douzaine de militantes anonymes déposent une gerbe sous l’Arc de Triomphe, à la gloire de la Femme du soldat inconnu. Sur leurs banderoles, il est écrit : Il y a plus inconnu que le soldat inconnu : sa femme.
Elles sont aussitôt arrêtées par la police, mais dès le lendemain la presse annonce « la naissance du MLF ». « La libération des femmes, année zéro » titrait une revue.
Le MLF ne se veut ni une organisation ni un parti ; aucun leader n’est toléré. Le mouvement se compose de collectifs et groupuscules. Les militantes féministes veulent se battre sur tous les terrains, en vertu du principe que le privé est politique. Elles rejettent les canons de beauté imposés par le diktat patriarcal, réclament crèches et garderies, demandent à leurs conjoints de partager les tâches domestiques. La révolution sexuelle est passée par là : elles dénoncent viol, inceste et agressions sexuelles, luttent pour l’avortement.
C’est tout un mode de vie et de pensée que les féministes des années 70 veulent changer. Elles ne veulent rien moins que tout le droit pour toutes les femmes, comme l’avait superbement formulé Olympe de Gouge en 1792, ce qui lui valut la guillotine."
(En France, le MLF n’émerge qu’à partir de 1970).



Articulet de Combat, le 27 juillet 1970. La  militante américaine interpelée serait Namascar Shaktini (DR).

Lily Wonderverden

- "26 août 1970 : mais que font ces quelques femmes réunies devant la flamme du soldat inconnu, à Paris, sous l’Arc de Triomphe ?
Elles sont une dizaine. L’une d’entre elles porte une gerbe de fleurs où l’on peut lire : "À la femme inconnue du soldat".
Huit autres déploient des banderoles :
- "Un homme sur deux est une femme" ;
- "Il y a plus inconnu que le soldat inconnu : sa femme" ;
- "Solidarité avec les femmes en lutte aux USA" :
- "Libération des Femmes".
Autour d’elles virevoltent quelques photographes et journalistes prévenus pour l’occasion. Le lendemain, leurs articles paraissent dans les journaux souvent à la Une.
Le mot de désordre est lâché : LIBÉRATION DES FEMMES. Il va courir tout au long des décennies, parfois ouvertement, souvent en sourdine, pour passer, tel un furet, d’une vie à l’autre."
(Blog Aliceswonderverden, 24 août 2010).

Sylvie Duverger


- "Le 26 août 1970, quelques rebelles insensées s'en allèrent déposer une gerbe à cette effacée de la grande histoire, plus inconnue encore que son peut-être digne et tendre époux, le fameux soldat, celui qu’on ne connaît pas, mais quand même. Le célèbre soldat inconnu… Oxymore à la hauteur du désordre symbolique, qui donne place généalogique aux hommes et efface les noms des femmes ; oxymore à la profondeur des trous de mémoire de l'Histoire, qui s'évertue à ne garder de traces que des hommes, petits ou grands soldats, et jusqu'à ceux dont nulLE n'est venuE chercher la dépouille au champ des morts.
Le 26 août 1970, 9 ou 10 jeunes insolentes – le nombre dépend des récits – signalaient à l’attention qu’ « un homme sur deux est une femme », et qu’il était temps, en somme, que les femmes jouissent des droits de l’homme : celui de disposer de son corps, en premier lieu, celui d’être reconnu comme un corps-sujet à part entière."
(Le Nouvel Observateur, Féministes en tous genres, 28 août 2012).



Photo dans France Soir. De galants policiers se proposent de porter obligeamment gerbe et banderoles. Le journal évoque "un commando en jupons", cette formule choc des mots se trouve contredite par son propre cliché ne montrant que deux robes (DR).

Benoite Groult

- "Il faudra attendre le reflux de la vague gauchiste en 70 et la déception des lendemains d'utopie, surtout pour les femmes, traditionnelles flouées de ce genre d'aventure, pour que toute une génération de filles nées après guerre comprennent que le salut ne viendrait que d'elles-mêmes et prennent conscience de la nécessité d'une lutte spécifique.
A toute révolution il faut un acte de naissance symbolique. Le nôtre date du 26 août 1970, jour où quelques militantes anonymes eurent l'idée de déposer à l'Arc de Triomphe une gerbe en hommage à la Femme du Soldat Inconnu."
(Ainsi soient-elles au xxie siècle, Grasset, 2000, 228 p.)

Parmi ces "quelques militantes anonymes" :

Cathy Bernheim (2), Julie Dassin, Emmanuelle de Lesseps (3), Christine Delphy (4), Christiane Rochefort (5), Namascar Shaktini (6), Monique Wittig (7), Anne Zelensky (8)...
(Sauf erreurs involontaires mais après croisements de documents et de témoignages).




Le Figaro, 27 août 1970, compare les femmes américaines et leurs " manifestations monstres" avec les françaises soit "un groupe d'une dizaine de militantes" (DR).

Anne Zelensky

- "L’initiative à l’Arc de triomphe a  concentré l’essence de ce qui serait notre mouvement, sa pensée, sa démarche, ses formes d’intervention. Toute la griffe MLF était là. Sauf que le label, nous ne l’avons jamais choisi, il nous a été plaqué de l’extérieur, par analogie avec le Women’s Lib américain. Nous, notre nom, c’était le Mouvement."
(L’Humanité, 26 août 2010).

Cathy Bernheim

- "Quand la libération des femmes a été à l’ordre du jour, en 1970, année surnommée par quelques-unes l’année Zéro, nous sortions de ce guêpier qu’avait été le « devenir femme ». Nous avions perdu quelques plumes quand nous avions dû nous arracher à la cage (plus ou moins dorée et confortable), de LA femme. La Femme, entité censée nous mettre à l’abri de la sauvagerie de la condition humaine, et des hommes en particulier, s’était révélée à nos yeux pour ce qu’elle était : une forteresse où l’on enfermait les petites filles pour qu’elles soient sages, avant de les lancer toutes crues, toutes nues, dans l’enclos de la foire.
Des tas de filles venues d’on ne sait où (et même si on le sait un jour, qu’importe ?) se sont liguées, liées, déliées ensemble pour se débarrasser du modèle d’armure encombrant et stérile qu’elles auraient dû revêtir avant d’oser arpenter les rues de la cité."
(Ce que l’histoire fait aux femmes, Multitudes 3/2010 (n° 42), p. 54-58).



Dans la dynamique de cette première manif à l'Arc de Triomphe, un groupe de militantes écrivent en mars 1971 un "Hymne" (des femmes, du MLF). Tant qu'à cultiver la symbolique, la musique est celle du Chant des Marais (7)...

Hymne



Nous, qui sommes sans passé, les femmes,
nous qui n'avons pas d'histoire,
depuis la nuit des temps, les femmes,
nous sommes le continent noir.

Refrain
Levons-nous, femmes esclaves
Et brisons nos entraves,
Debout ! Debout !

Asservies, humiliées, les femmes
Achetées, vendues, violées ;
Dans toutes les maisons, les femmes,
Hors du monde reléguées.

(R)

Seules dans notre malheur, les femmes
L'une de l'autre ignorée,
Ils nous ont divisées, les femmes,
Et de nos sœurs séparées.

(R)

Reconnaissons-nous, les femmes,
Parlons-nous, regardons-nous,
Ensemble on nous opprime, les femmes,
Ensemble révoltons-nous.

(R)

Le temps de la colère, les femmes,
Notre temps est arrivé
Connaissons notre force, les femmes,
Découvrons-nous des milliers.



N° double de partisans, juillet - octobre 1970 (Graph. JEA/DR).
 

NOTES

(1) Françoise Pics, Libération des femmes, 40 ans de mouvement, Ed. Dialogues, 2011, 529 p.

(2) Cathy Bernheim, Naissance d'un mouvement de femmes, 1970-1972, Ed. Félin Poche, 2010, 231 p.

(3) Emmanuelle de Lesseps, coauteure avec Christine Delphy et et Monique Piazza de Questions féministes, Ed. Syllepse, 2012, 1022 p.

(4) Christine Delphy, Un universalisme si particulier : Féminisme et exception française (1980-2010), Ed. Syllepse, 2010, 348 p.

(5) Christiane Rochefort, Oeuvre romanesque, Grasset et Fasquelle, 2004, 1493 p.

(6) Namascar Shaktini, On Monique Witting, Theoretical, Political and Literary Essays, University of Illinois Press, 2005, 288 p.

(7) Monique Witting, La pensée straight, Ed. Amsterdam, 2013, 135 p.

(8) Anne Zelensky, Histoire de vivre : mémoires d'une féministe, Calmann-Lévy, 2005, 404 p.

(9) En 1933, le "Chant des marais" fut composé au camp de Börgermoor (Basse-Saxe) où les nazis expérimentaient le système concentrationnaire. Trois des internés politiques ont signé ce Chant : Johann Esser et Wolfgang Langhoff pour les paroles ainsi que Rudy Goguel pour la musique.

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lundi 8 juillet 2013

P. 246. La "Jeunesse" de Justine Malle


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Justine a repris la caméra tombée des mains de son père
mais pour tourner son cinéma personnel...

Synopsis par Justine Malle

- "J’avais vingt ans en 1995, l’année de la mort de mon père, le cinéaste Louis Malle. J’étais en khâgne. Au moment même où je commençais à tomber amoureuse d’un garçon de ma classe et à rejeter l’influence de mon père, sont apparus chez lui les premiers symptômes d’une maladie. J’étais terrassée, autant par le choc de la nouvelle que par la certitude d’en être à l’origine avec mes velléités d’indépendance. Le sentiment de culpabilité que j’éprouvais m’a fait agir de façon inappropriée. Ma violente honnêteté d’alors incarne pour moi une certaine idée de la jeunesse..."

Sophie Grassin

- "A l’âge où l’on se défait de l’influence du père, une jeune fille de 20 ans, en hypokhâgne à Paris (Esther Garrel, autre fille de…), apprend la maladie dégénérative du sien, cinéaste : bientôt, il ne parlera plus, ne marchera plus… Cette fin lente et annoncée se heurte à son désir de vivre et à ses amours naissantes. Justine Malle (fille de Louis, mort en 1995, et de l’actrice Alexandra Stewart) sonde avec une honnêteté cruelle mais libératoire les sentiments contradictoires qui la traversèrent pendant le chemin de croix de son père réfugié dans le manoir où fut filmé «Black Moon», près de Cahors. Elle pioche un peu de réconfort dans le Louis Malle des Indes («Calcutta»), fouille ses propres dérobades (sa douleur l’empêche de lui dire au revoir), convoque le fantôme encore vaillant de Louis Malle…"
(CinéObs, 2 juillet 2013).

Mathilde Blottière

- "Il est des héritages qui vous compliquent la vie. Surtout s'ils sont prestigieux. Dans le premier film de Justine Malle, fille de Louis et de l'actrice Alexandra Stewart, la peur de se lancer est aussi palpable que la nécessité de raconter son histoire. Dans la bouche de ses personnages, elle sème quelques phrases qu'elle pourrait faire siennes : "Je ne sais pas si c'est une bonne idée de faire ce film", dit, par exemple, le père réalisateur à sa fille... Et ce n'est évidemment pas un hasard si elle confie à Esther Garrel, fille d'un autre grand cinéaste (Philippe Garrel), le rôle de la jeune femme qu'elle était en 1995, l'année où son père est mort... Justine avait alors 20 ans, l'envie de se forger une identité bien à elle et de tomber amoureuse comme on se fait "renverser par une voiture". A la soudaine maladie qui condamne son père (Didier Bezace), Juliette, son personnage, oppose ce côté brusque et braque de la jeunesse, cette horreur de la feinte et du compromis. Dans ce beau récit d'apprentissage, la mise en scène est sage, mais la simplicité et la délicatesse du trait touchent juste. D'un naturel bluffant, Esther Garrel est particulièrement convaincante, tour à tour têtue et fragile. Insolemment jeune."
(Télérama, 3 juillet 2013).

Esther Garrel et Didier Bezace - Justine et Louis Malle (DR).

Vincent Ostria

- "Au-delà du sujet et de cette histoire de filiation, on est frappé de voir à quel point Justine Malle entre dans le cinéma à pas feutrés et semble constamment craindre un faux pas (voire comment elle se “couvre” avec un découpage très conformiste).
Un travail poli et policé, quasiment neutre, à l’instar de ses personnages de khâgneux au langage châtié qui font des manières pour baiser (l’un d’entre eux répugne même à dire “coucher”).
Ce n’est ni lourd ni mal fait, mais il faut parfois sortir un tout petit peu de ses gonds pour exister."
(les inRoKs, 2 juillet 2013).

Sophie Benamon

- "Pour ses débuts derrière la caméra, Justine Malle, la fille de Louis, ne se cache pas et aborde d'emblée le noeud gordien de sa vie : la mort de son père. Dans cette autofiction, son double, qu'incarne Esther Garrel, fait face à l'ambivalence des sentiments qui la traversent à l'annonce de la maladie de son père. Elle dessine le portrait, sans concession, d'une jeune fille qui s'emballe pour un garçon de sa classe de khâgne, assez présomptueux. La réalisatrice montre, par petites touches, comment se partagent dans le coeur de la jeune adulte son état amoureux, ses velléités d'indépendance et la culpabilité qu'elle éprouve vis-à-vis de son père, de sa maladie soudaine. La jeune femme va même le rejeter un temps, comme pour nier la réalité, rester dans l'enfance.
Le propos est subtil, l'émotion est à fleur de peau. Esther Garrel (17 filles, L'Apollonide - souvenirs de la maison close) réussit à jouer sur la corde raide de l'adolescence, entre fragilité et assurance. Face à elle, Didier Bezace est on ne peut plus émouvant en père impuissant face à la maladie. C'est sûr, Justine Malle prend la relève en assumant son héritage (elle inclut même un extrait du documentaire de son père sur l'Inde) mais en traçant sa propre route. De beaux débuts !"
(Studio Ciné Live, 2 juillet 2013).

Les critiques de l’Express, de La Croix et du Monde sont plus tièdes…




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jeudi 31 janvier 2013

P. 220. Le 2 février 1927, Camille Claudel écrit à sa mère : "je suis horriblement malheureuse"...


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(Mont. JEA/DR).
- Camille Claudel, Eric Liberge et Vincent Gravé, Glénat, 2012.
- 9ème Journée Internationale des Femmes : l’Association Pour Perpétuer le Souvenir des Internées des Camps de Brens et de Rieucros en partenariat avec l’association Paroles de femmes a proposé :
Camille Claudel, l’Interdite !
un spectacle théâtral de la compagnie Cornet à dés, le 4 mars 2011.

Edmonde Charles-Roux


- "Camille Claudel est née en 1864, morte en 1943. Pour mémoire : son frère est de quelques années plus jeune qu’elle (1868-1955). La date clé de la vie de Camille est mars 1913, le jour où la mère de Camille, qui n’aime pas sa fille, demande son internement. Une mesure à laquelle aucun membre de sa famille ne s’oppose. Paul Claudel est de passage en France. Il connaît le jour et la date où sa sœur sera emmenée entre deux infirmiers mais ni lui ni aucun membre de sa famille ne veulent assister à son départ. D’abord internée à Ville-Evrard, Camille en sera évacuée pour cause de Grande Guerre en 1914 et transférée à Montdevergues. Elle n’en sortira plus."
(La Provence, 30 janvier 2005).

Claudine Galéa

- "L’ex-égérie de Rodin, l’immense sculptrice des Causeuses ou de La Valse, œuvres qu’on peut admirer au musée Rodin, – il l’aura « possédée », même dans la reconnaissance du génie –, a cessé de modeler la glaise et de travailler le marbre, enfermée par sa mère, dès lors que son père – son unique protecteur – fût mort. Enfermée par sa mère, avec l’assentiment muet de son frère, Paul."
(La Marseillaise, 8 février 2004).

Gabrielle Napoli

- "L’amour de Camille pour Rodin relève de la tragédie, est synonyme de folie et de mort et ce dès la première rencontre entre les deux amants : « la grande houle dans le corps qui jouissait sans se livrer, ailleurs pour toujours, aimant et plein de haine. » Avant l’enfermement à l’asile, Camille est véritablement déshumanisée. Pensons simplement à ce passage où, tapie dans les fourrés, elle observe, en haut de la colline, la demeure de « Monsieur Rodin ». Qu’en est-il de cet amour fou qui va jusqu’à l’abdication devant l’homme « qui décidait de ces choses » ? Paul, le complice de l’enfance, l’ami, au tout début de cet amour dans lequel Camille « s’enivre de céleste » écrivait que « c’était se perdre que d’aimer de la sorte ». Amour tragique donc parce que l’on ne peut ni lutter contre ni l’assouvir, « Ils ne pouvaient ni être ensemble ni se séparer ». Une véritable fatalité pèse sur l’existence de Camille qui tel un héros tragique, boite. Cela ne peut manquer de nous rappeler l’héroïne du Soulier de Satin qui dépose aux pieds de la Vierge son soulier afin de ne s’élancer vers le mal qu’avec « un pied boiteux ». L’amour est inséparable de la mort, l’amour est la mort, pour Camille comme pour Paul : « cette femme qu’il avait aimée, il avait connu la mort qu’il lui fallait, l’amour, il n’en parlerait jamais autrement. »
(La Quinzaine littéraire, n° 872).

Mireille Tissier

- "Les relations mère-fille sont très conflictuelles : Louise ne vient jamais voir Camille mais correspond régulièrement avec elle. Elle lui envoie aussi des colis de nourriture, Camille refusant obstinément le confort de la première classe. A la mort de Louise, en 1929, Paul, frère cadet de Camille, continue de payer la pension de sa sœur. Mais il ne lui rend visite que de loin en loin, une fois par an en 1933, 1934, 1935 et 1936. Lorsque éclate la guerre, il se réfugie dans sa propriété de Brangues près de Grenoble (Paul à 71 ans).
A la date du 14 août 1942, il écrit dans son Journal : "Mauvaises nouvelles de ma sœur Camille tombée dans le gâtisme et q[ui] souffre des restrictions." Puis, à la date du 8 décembre 1942 : "Une lettre de Montdevergues m'avertit q[ue] ma pauvre sœur Camille va de plus en plus mal et me fait prévoir sa mort, q[ui] sera une délivrance, 30 ans de prison chez les fous, de 48 à 78 ans. Je me rappelle cadette jeune fille splendide, pleine de génie, mais ce caractère violent, indomptable !" Pour autant, il ne fait pas le voyage de Montdevergues où, d'après son Journal , il ne s'est pas pas rendu depuis août 1936."
(Camille Claudel – de la grâce à l’exil – la femme, la folie, la création, 20 mars 2010).

Edmonde Charles-Roux

- "Lorsqu’elle mourut (1), personne n’assista à sa mise en terre. Du reste, sa mère n’était jamais venue la voir. En 1962, lorsque le fils de Paul chercha à faire transporter les restes mortels de Camille dans le tombeau des Claudel, l’administration de l’hôpital psychiatrique fit savoir à la famille qu’il lui était impossible de retrouver la sépulture de Camille dans le cimetière."
(La Provence, 30 janvier 2005).

Mireille Tissier

- "Camille Claudel meurt le 19 octobre à 14h15. A 11 heures, Paul reçoit un premier télégramme l'informant que sa sœur est très fatiguée et que ses jours sont en danger. Puis à 5 heures un second qui l'informe qu'elle est décédée et que l'inhumation aura lieu le lendemain. "Ma sœur ! Quelle existence tragique ! A 30 ans, quand elle s'est aperçue q[ue] R[odin] ne voulait pas l'épouser, tout s'est écroulé autour d'elle et sa raison n'y a pas résisté. C'est le drame de l'Age mûr", écrit-il à cette nouvelle. Camille est enterrée dans une fosse commune du cimetière du village de Montfavet, dont dépend l'asile. Aucun membre de la famille n'assiste à la cérémonie comme en témoigne cette lettre rédigée par l'aumônier de l'asile à l'intention de Paul le 20 octobre 1943 : "Mr l'Ambassadeur - c'est l'aumônier de M[ont]devergues q[ui] vient vous présenter ses condoléances tout d'abord et ensuite v[ou] dire q[ue] Melle Claudel a été bien soignée. - Bonne nature, bien élevée, elle était très aimée dans son quartier et les infirmières avaient pour elle b[eau]c[ou]p d'attentions. L'aumônier q[ui] v[ous] écrit allait la visiter souvent et il était toujours reçu d'une façon charmante. Son agonie n'a pas été bien longue : elle s'est éteinte tout doucement après avoir reçu les sacrements."
(Camille Claudel – de la grâce à l’exil – la femme, la folie, la création, 20 mars 2010).


(Mont. JEA/DR).
Camille Claudel, jeune artiste ou vieille aliénée : toujours génie martyrisée.

A peine son père décédé, Camille Claudel est enfermée comme "folle". Abandonnée. Totalement. Punie à une lente peine de mort pour avoir porté trop d'ombre talentueuse à maître Rodin et pas assez bourgeoise grenouille de bénitier à l'estime de son frère ambassadeur (y compris des lettres).
Alors, pour traverser les murs de sa solitude plombée, Camille écrit. A son bourreau : sa propre mère, experte en tortures morales.

Camille Claudel :

  .............................................................................................."Montdevergues, 2 février 1927,

Ma chère maman, (2)

J'ai beaucoup tardé à t'écrire car il fait tellement froid que je ne pouvais plus me tenir debout.
Pour écrire, je ne puis me mettre dans la salle où se trouve tout le monde, où brûlotte un méchant petit feu, c'est un vacarme de tous les diables. Je suis forcée de me mettre dans ma chambre au second où il fait tellement glacial que j'ai l'onglée, mes doigts tremblent et ne peuvent tenir la plume. Je ne me suis pas réchauffée de tout l'hiver, je suis glacée jusqu'aux os, coupée en deux par le froid. J'ai été très enrhumée. Une de mes amies, une pauvre professeur du Lycée Fénelon qui est venue s'échouer ici, a été trouvée morte de froid dans son lit. C'est épouvantable. Rien ne peut donner l'idée des froids de Montdevergues. Et çà dure 7 mois au grand complet. Jamais tu ne peux te figurer ce que je souffre dans ces maisons. Aussi ce n'est pas sans une surprise d'épouvante que j'ai appris que Paul me faisait mettre en 1re classe. C'est curieux que vous disposez de moi comme il vous plaît sans me demander mon avis, sans savoir ce qui se passe; vous n'êtes jamais venus ici et vous savez mieux que moi ce qu'il me faut (...).
Je vous ai déjà dit que les premières classes étaient les plus malheureuses. D'abord leur salle à manger est dans le courant d'air, elles sont à une toute petite table serrées les unes contre les autres. Elles ont toujours la dissenterie d'un bout de l'année à l'autre, ce qui n'est pas le signe que la nourriture est bonne. Le fond de la nourriture est celui-ci - de la soupe (c'est-à-dire de l'eau de légumes mal cuits sans jamais de viande) un vieux ragout de boeuf en sauce noire, huileux, amère, d'un bout de l'année à l'autre, un vieux plat de macaronis qui nagent dans le cambuis, ou un vieux plat de riz du même genre en un mot le graillon jusqu'au bout, comme hors-d'oeuvre quelques minuscules tranches de jambon cru, comme dessert de vieilles dattes chauvreuses ou trois vieilles figues racornies ou trois biscottins ou un vieux morceau de fromage de bique : voilà pour vos 20F par jour; le vin c'est du vinaigre, le café c'est de l'eau de pois chiches.
C'est réellement faire preuve de folie que de dépenser un argent pareil. Quant à la chambre c'est la même chose; il n'y a rien du tout, ni un édredon, ni un seau hygiénique, rien, un méchant pot de chambre les trois quarts du temps ébréché, un méchant lit de fer où on grelotte toute la nuit (moi qui déteste les lits de fer) (...).
Je ne veux à aucun prix rester de la 1re classe et je te prie à la réception de cette lettre de me faire remettre de troisième comme j'étais avant.
Puisque tu t'obstines malgré mes objurgations à me laisser dans les maison de santé où je suis horriblement malheureuse, au mépris de toute espèces de justice, au moins économise ton argent et si c'est Paul communique-lui mes appréciations.
En as-tu des nouvelles ? Sais-tu de quel côté il est actuellement. Quelles sont ses intentions à mon égard ? A-t-il l'intention de me laisser mourir dans les asiles d'aliénés ?
(...)
Camille."
(3).


(Mont. JEA/DR)
Camille Claudel : La Valse (Dét.) et la stèle au cimetière de Montfavet où les restes de l'artiste furent mis dans la fosse commune.

NOTES :

(1) Edmonde Charles-Roux estime que Camille Claudel mourut de faim.
Ce qui rappelle "Le drame des asiles de Vichy", un article de Régis Guyotat :
- "Cinquante mille malades mentaux sont morts de faim sous l'Occupation. De nouveaux travaux d'historiens relancent un débat qui agite depuis 1987 le milieu de la psychiatrie.
Près de cinquante mille malades mentaux sont morts de faim, entre 1940 et 1944, dans les établissements psychiatriques français. L'hôpital du Vinatier, à Bron, dans la région lyonnaise, compta, à lui seul, près de deux mille victimes."
(Le Monde, 17 octobre 2003).

(2) L'orthographe de l'original a été respectée.

(3) Ce courrier a été publié par Jacques Cassar, dossier Camille Claudel, librairie séguier/archimbauld, 1988, 519 p., PP. 287 à 289.

Site de l'Association Camille Claudel ? Cliquer : ICI.

Bande annonce du film "Camille Claudel" de Bruno Nuytten (1988) avec Isabelle Adjani (coproductrice) et Gérard Depardieu (Rodin) ? Cliquer : ICI.

Plus dans l'esprit de cette page, un film de Bruno Dumont : "Camille Claudel 1915" est annoncé pour mars 2013. Avec Juliette Binoche dans le rôle de Camille. Bande annonce ? Cliquer : ICI.


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jeudi 8 novembre 2012

P. 196. Mona Ozouf et Jane Austen


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Mona Ozouf,
La cause des livres,

Gallimard, 2011, 547 p.


Mona Ozouf


- "J'ai réuni dans ce livre des articles que, pendant quarante ans, j'ai donnés au Nouvel Observateur. Une actualité littéraire fantasque les a souvent inspirés, les figures imposées du journal en ont toujours dicté la forme : c'est une brocante où le hasard semble avoir plus à dire que la nécessité. Et pourtant, cette promenade buissonnière à travers les livres dessine peu à peu un itinéraire familier. On retrouvera ici les aveux du roman, les mots des femmes, l'ombre portée de la Révolution sur les passions françaises, et un tableau de la France et des Français où l'on voit une diversité obstinée tenir tête à la souveraine unité de la nation. Ces rencontres d'occasion avec les œuvres et les figures du passé me renvoient donc à mes goûts et à mes attaches. Je n'ai pas de peine à reconnaître en elles des voix amicales et des présences consolantes. Mais j'y vois aussi surgir l'événement intempestif, la rencontre inattendue, la surprise des sentiments. La littérature et l'histoire, sur la chaîne usée des destinées humaines, n'ont jamais fini de broder les motifs inépuisables de la complexité. Telle est la cause des livres."
(4e de couverture).

Antoine de Baecque

- "Mona Ozouf (…) démontre sa sensibilité aux écrivains, son goût sûr pour les mémoires et les correspondances, son art du portrait, qu'il soit celui de femmes ou d'amis historiens. Surtout brille un style qui n'a que peu d'égaux dans la littérature française actuelle."
(Le Monde, 24 novembre 2011).

Grégoire Leménager


- "C'est la boutique idéale pour découvrir les secrets de Voltaire, Henry James ou Flaubert, cet « anachorète enchaîné à l'écriture »; comprendre ce que les femmes doivent à George Sand et à Mme de Staël ; entrevoir ce que peut cacher le séduisant « mépris de la politique» affiché par les écrivains de droite ; saisir, chez ceux qui lui ont survécu, comment la Révolution a « assassiné le cours paisible du temps ».
Il n'est pas étonnant que l'auteur des « Aveux du roman » tienne Jean Starobinski et Paul Bénichou pour des maîtres; comme eux, elle sait qu'il n'est pas toujours superflu de considérer un texte dans son contexte, et que la lecture tourne en rond quand elle prend la littérature pour un jeu de construction formelle.
Mais elle sait surtout, à travers des images toujours fines et pénétrantes, faire de l'érudition le plus agréable des commerces. Plaire et instruire, sans laisser voir que chaque article est bâti avec la rigueur d'une leçon d'agrégation, c'est la suprême élégance de Mona Ozouf."
(Le Nouvel Observateur, 13 octobre 2011).

Marc Riglet

- "Mona Ozouf, née en 1931, est fille d'instituteurs bretons. De son père, militant de la cause bretonne, elle tire sa sensibilité aux sentiments d'appartenance aux "petites patries". De son éducation républicaine, elle retient les valeurs de l'excellence scolaire. Normalienne, agrégée, elle se distingue par ses travaux sur la Révolution, la République et son école, les femmes de lettres et, aussi, sur les liens qui s'établissent entre la littérature et l'histoire. Chroniqueuse littéraire au Nouvel Observateur depuis près d'un demi-siècle, servie par une écriture d'une rare élégance, elle aura jeté sur les travaux de ses pairs un regard bienveillant mais justement critique."
(Lire, 21 novembre 2011).


(Mont. JEA/DR).

Chronique littéraire de Mona Ozouf : "Une vieille fille indigne"
consacrée à deux publications :
- Claire Tomalin, Jane Austen, passions discrètes, Autrement, 2000
et
- Jane Austen, Oeuvres romanesques complètes, t. 1, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2000
(Le Nouvel Observateur, 9 novembre 2000).


Le décor des romans de Jane Austen

- "Le ciel était bas, il pleuvait beaucoup. Autour des presbytères de campagne, les chemins étaient de fondrières, il fallait attendre le gel pour chausser les galoches, et tenter dans le collines des marches héroïques, vite interrompues par la bourrasque. Les demoiselles de la gentry restaient le front aux vitres, levant leur rideau de dentelle sur une pluie définitive, guettant la chaise de poste, l'invitation à un goûter, la visite porteuse des potins du village : une maison de campagne s'ouvre à un nouveau locataire; on annonce le passage d'un régiment; parfois une jeune folle s'enfuit au bras d'un galant vers l'Ecosse complaisante aux mariages clandestins, et c'est pour des semaines la promesse de délicieux commérages."
(P. 285).

Un génie féminin persécuté ?


- "Notre époque adore les victimes. Les biographes de Jane n'ont eu que trop d'inclinaison à voir en elle une génie féminin persécuté. (...)
On trouvera plus de justesse dans la méticuleuse biographie de Claire Tomalin. Grâce à elle, nous savons que le presbytère de Selborne n'était pas une résidence maussade pour la petite Jane : sept frères, une soeur, une ribambelle de cousins avec qui s'ébattre. De plus, tout le monde écrivait dans la famille Austen : le père, des sermons; la mère, des élégies; les frères, des essais pour les journaux d'Oxford; tous, des pièces de théâtre qu'on jouait en famille. La bibliothèque paternelle était libéralement ouverte aux filles comme aux garçons, romans compris. Et quand Jane se mit à écrire, loin de devoir cacher ses "histoires", elle les lisait le soir accotée à la cheminée, les dédiait à un frère, les faisait illustrer par sa soeur. Son père s'ingénia à lui trouver un éditeur, toute la famille tira orgueil de son talent. Etrange victime donc."
(PP. 285-286).

Un portrait de Jane Austen ?


- "Assez belle, avec des joues un peu pleines", dit l'un des témoins, ce qui donne peu à rêver. Au gré des observateurs, Jane était tantôt timide, tantôt intimidante, tantôt fantasque, tantôt raide. Tantôt sensible et tantôt, aux yeux de Charlotte Brontë, "absolument imperméable à la passion". Insaisissable donc : sa nouvelle biographie respecte cette évanescence en renonçant au portait en pied. Au lecteur de rassembler les indices."
(P. 286).


(Mont. JEA/DR).

Les héroïnes de Jane Austen ?


- "Elles ne sont guère plaintives, ces demoiselles. Et, circonstances aggravantes pour notre temps, fort peu révoltées. Marianne, Catherine, Elinor, Elisabeth vivent indifférentes à l'histoire, dans une époque pourtant fertile en révolutions (...). Elles ne songent pas davantage à contester l'ordre établi, même s'il est loin d'être tendre aux jeunes filles (...). Le mariage est la clé de leur destinée, mais l'argent est la clé du mariage.
(P. 287).

- "L'univers de Jane est impitoyablement rincé de tout romanesque, et pourtant cette lectrice de Rousseau n'a pas renoncé au romantisme de l'amour partagé. Elle confie à ses plus séduisantes héroïnes, comme l'Elisabeth d'Orgueil et préjugés, le soin de montrer comment on peut intelligemment interpréter la partition obligée de la chasse au mari."
(P. 288).

- "Ses héroïnes s'évertuent à passer des compromis honorables entre "Sensibility" et "Sense" (traduit ici, de façon un brin trop pascalienne à mon goût, par Le Coeur et la Raison). Elles cherchent, sans jamais crierà l'injustice du monde et des hommes, à tenir un compte équitable des heurs et des malheurs que leur réservait la destinée. Et c'est cette lucidité dénuée de ressentiment qui nous les fait aimer, elles et Miss Austen, leur mentor ironique."
(P. 289).

NB : Autres livres sur les rayons de la bibliothèque de ce blog ? Cliquer : ICI.

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lundi 5 novembre 2012

P. 195. "Une famille respectable", le film


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Quand son ire rend le cinéma encore plus irremplaçable... (DR).

Synopsis


- "Arash est un universitaire iranien qui vit en Occident. Il retourne donner des cours à Chiraz où vit sa mère, loin de Téhéran. Entraîné dans un tourbillon d’intrigues familiales et financières, il replonge dans un pays dont il ne possède plus les codes. A la mort de son père, découvrant ce qu’est devenue sa "famille respectable", il est contraint de faire des choix."

Massoud Bakhsi


- "J’ai été influencé et inspiré par les films de Jean-Pierre Melville ou par ceux de la Nouvelle Vague. L’intrigue qui guide le trajet d’Arash, mon personnage principal, est un dévoilement progressif de secrets et de complots. Une autre ligne de récit me vient du cinéma de "drame familial", et surtout des néoréalistes italiens. La famille est le lieu du drame."

Serge Kaganski

- "L’Iran, terre de cinéma féconde."
(les inRocks, 30 octobre 2012).

Guillaume Loison


- "Pour son premier long-métrage de fiction, le jeune réalisateur Massoud Bakhshi frappe fort : d’images quasi volées de bastonnades en pleine rue en tableaux cauchemardesques d’une caste d’oligarques cyniques, le film perce avec ardeur les tabous d’un pays sous éteignoir, tissant un remarquable polar existentiel, entre Marco Bellocchio et Francesco Rosi."
(CinéObs, 30 octobre 2012).

Olivier De Bruyn

- "Le cinéma iranien n’en finit pas décidément de révéler de nouveaux metteurs en scène passionnants et critiques. Avec « Une famille respectable », découvert en mai dernier au Festival de Cannes (Quinzaine des réalisateurs), Massoud Bakhshi, à l’instar de ses confrères Jafar Panahi et Mohammad Rasoulof, signe une fiction qui n’a aucune chance de plaire aux autorités locales. Un film qui relève à la fois du cinéma de genre (le genre thriller paranoïaque) et du réalisme le plus pointilleux, ce qui n’étonne guère quand l’on connaît le pedigree créatif de Massoud Bakhshi, connu jusqu’alors pour ses documentaires."
(Rue 89, 29 octobre 2012).


L'affiche pour la Quinzaine des réalisateurs à Cannes (DR).

Louis Danvers

- "Le courage des cinéastes iraniens, comme celui des étudiants qui osent défier la terreur du système, n'a de pareil nulle part dans le monde. Massoud Bakhshi est de la trempe de Jafar Panahi, de cette intelligence persane qui ne supporte plus le joug abrutissant d'une théocratie islamique aussi rétrograde qu'oppressante. Le héros de son film, Arash, exerce à l'étranger son métier de professeur au niveau universitaire. Invité à revenir dans son pays natal pour y enseigner durant un semestre, il s'y verra confronté à plusieurs menaces. Celles d'autorités promptes à interdire la diffusion de ses travaux, même parmi ses étudiants, et pour lesquelles les réunions de poésie auxquelles il convie certains élèves ne peuvent qu'être suspectes. Des autorités qui lui refusent par ailleurs les documents nécessaires à sa sortie du pays... Mais Arash verra aussi de mauvaises surprises venir de son environnement familial, une question d'héritage éveillant dans la bourgeoisie affairiste de Téhéran des convoitises faisant fi de tout scrupule moral. D'un côté (le pouvoir politique et académique) une pose morale intégriste, de l'autre (la classe aisée) une absence de morale assumée. Le héros est pris entre deux feux, dans un scénario que n'aurait pas renié Kafka."
(Le Vif, 30 octobre 2012).

Pierre Murat

- "Apparemment, c'est donc un thriller familial : des monstres s'y trahissent avec allégresse, s'y entre-dévorent pour préserver leur pouvoir. Mais ils permettent au réalisateur, dont c'est le premier film, de dissimuler un propos plus ambitieux, une dénonciation plus audacieuse. Ils reflètent, évidemment — ces monstres —, l'âme de tout un pays. Cet Iran sans foi ni loi, où tout s'achète et se vend, même les « martyrs » de la lointaine guerre contre l'Irak. Cet Iran où les femmes ne peuvent survivre que dans le renoncement ou la folie — femmes à la pureté intacte, inébranlable, à qui le réalisateur rend le plus courageux des hommages. Cet Iran où la peur est constante : chaque fois qu'il se trouve dans les rues, Arash voit des flics tenter de se frayer un passage, toutes sirènes hurlantes, ou des voitures s'encastrer les unes dans les autres, signes évidents d'une hystérie généralisée. Et quand il se rend chez son demi-frère, il se retrouve soudain enfermé, prisonnier : superbe séquence où il se cogne, telle une proie affolée, à des portes et des fenêtres hermétiquement closes. Ici et ailleurs — partout —, le danger rôde..."
(Télérama, 31 octobre 2012).

Noémie Luciani

- "Film de mafia, métaphore sociale, Une famille respectable se lit comme mythe contemporain. A l'image des grandes dynasties antiques, il pose la faute d'un homme faisant peser le poids d'une malédiction sur les générations suivantes. Ici, c'est la fracture de la cellule familiale - le père d'Arash faisant un enfant à une autre femme - qui scinde toute la descendance en deux branches maudites. D'un côté, les victimes (Arash et son frère martyr), de l'autre les bourreaux (Jafar, le fils illégitime, et son fils Hamed). Comme le héros persan dont il tire son nom, comme Œdipe ou Oreste, Arash refuse de se soumettre au destin qu'on lui impose. Ce destin, cependant, n'est plus le témoignage des inquiétudes originelles du monde, mais celui de son évolution à contresens de toute mystique.
L'ultime refuge, le dernier repère d'Arash qui vaille, ce sont les femmes qui l'entourent. Bien avant qu'il puisse voir le piège, elles le devinent. Elles se battent encore pour ce que les hommes semblent avoir renoncé à défendre : l'intégrité, le respect de l'autre, la famille. Désireux de montrer qu'il ne s'agit guère de broder autour d'une féminité archétypale, c'est aux femmes de son pays que Massoud Bakhshi dédie son film."
(Le Monde, 30 octobre 2012).


David Fontaine : "L'Iranienne serait-elle l'avenir de l'Iran ?" (Le Canard enchaîné, 31 octobre 2012).

Massoud

- "Mon pays est jeune – le second plus jeune dans le monde – et les femmes, les étudiantes notamment, portent sur notre société un regard lucide. Elles savent combien certaines valeurs et plus généralement la morale – une morale qui n’a rien à voir avec la religion – sont essentielles. Elles sont l’avenir, comme le sont les cinéastes qui, aujourd’hui, croient fermement que notre pays mérite d’être raconté."
(Rue 89, 29 octobre 2012).

Gérard Lefort


- "De Chiraz à Téhéran (principaux décors du film), ce ne sont qu’images grises, plans troubles et impression générale d’une vie quotidienne salopée, où la corruption semble l’oxygène ambiant, et la violence urbaine, la routine (nombreuses scènes de vols à la tire, d’échauffourées, d’altercations brutales).
Electrochocs. Les femmes, quand elles ne se prennent pas une beigne, voire des électrochocs, pour calmer leur «dérèglement», sont condamnées au courage (comme la Mère du même acabit) ou à la folie douce, telle une tante d’Arash, toute en tchador noir et gants de ménages jaunes, qui passe ses nuits à désinfecter sa cuisine."
(Libération, 30 octobre 2012).

Edwige de Montalembert

- "Film autour de la corruption, maîtresse de l’intrigue, le film traite aussi de la religion et de la culpabilité. Mais Une famille respectable est également un film sur la mémoire. Cette mémoire d’un pays qui a connu huit ans de guerre avec l’Irak est au cœur du personnage d’Arash. Le spectateur est surpris dans le fil de l’histoire du film par des images d’archives de la guerre Iran-Irak qui donnent au héros une épaisseur et nous rappelle à la réalité du pays. Entre son attachement culturel lié à sa mémoire et la sombre manipulation dans laquelle il est piégé, le héros doit faire un choix : partir ou rester en Iran.
(toutelaculture.com, 27 octobre 2012).

Utopia Bordeaux


- "Une (…) force du film est la place qu’il réserve aux femmes. Alors que les hommes sont souvent des lâches, des salauds ou des victimes plus ou moins résignées, les femmes sont là et bien là, figures de la résistance : la mère d’Arash, bloc de dignité et de ténacité que l’argent ne peut corrompre, Zoreh, qui s’est réfugiée dans la piété pour refuser d’être complice de l’avidité et de la duplicité de ses proches, et même la jeune Hoda, nièce d’Arash, qui représente le pendant positif d’Hamed, une jeunesse qui aspire à la vie et à l’ouverture. Et c’est bien vers cette ouverture que se tourne peu à peu Arash, et le film, parti pour être sombre, devient au final porteur d’un bel espoir…"



Autres films à l'affiche de ce cinéma rural ? Cliquer : ICI.

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lundi 22 octobre 2012

P. 191 bis. Octobre 2012 : quelques brèves...


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Ces derniers jours : ouvrir quelques livres et quelques journaux, les oreilles, son encrier, un peu de lumière, des rideaux, des poubelles mais aussi des boîtes à surprises...


A gauche : Bart De Wever étudiant gentiment ses classiques avant de se lancer en politique (Ph. RésistanceS).
A droite : le même, méchamment emporté par sa victoire aux élections communales anversoises.
(Mont. JEA/DR).

Bart De Wever

Octobre 2007. Le Bourgmestre (Maire) d'Anvers, Patrick Janssens, présente officiellement les excuses des Autorités communales pour leur collaboration active sous l'occupation, et d'abord dans les rafles de juifs déportés ensuite vers Auschwitz.
Une évidence est enfin admise : les troupes allemandes à elles seules n'auraient pu envoyer tant de victimes vers l'extermination si elles n'avaient reçu les aides volontairement efficaces des uns (les collabos volontaires) et la complicité ou la passivité des Autorités morales, judiciaires, politiques du pays. Des quatre villes du Royaume où furent enfermés les juifs : Anvers, Bruxelles, Charleroi et Liège, celle d'Anvers - à commencer par sa police - se distingua des trois autres par une efficacité supérieurement abominable !
Dirigeant d’un parti nationaliste flamand, la N-VA, Bart De Wever s’opposa aussitôt à de telles excuses. Au quotidien de Morgen, De Wever précisa :
- "Ce n'est pas la ville d'Anvers qui a organisé la déportation mais elle fut elle-même une victime de l'occupation. Ceux qui la dirigeaient à l'époque ont dû prendre des décisions délicates dans des circonstances difficiles. Je ne trouve pas très courageux de les stigmatiser maintenant…
Si l'on doit commémorer la Shoah, l'on ne peut perdre de vue la situation des territoires palestiniens occupés où certains ont recours à des techniques qui me font penser à un passé noir, plutôt que de tirer les leçons du passé"...
Et sur les antennes d’une télévision flamande (VTN) :
- "Quand j'ai dit que les excuses de Patrick Janssens était "gratuites", je faisais seulement allusion au fait qu'elles arrivent trop tard... Soixante ans après les faits, alors que tout le monde est mort, le fait de présenter des excuses n'est évidemment pas un acte de grand courage politique."

La méthode est systématique. Les bourreaux et leurs affidés sont présentés comme les vraies victimes. On excuse la collaboration comme étant un moindre mal. Des juifs ont peut-être payé mais combien d’autres n’ont-ils pas été épargnés ?
Et puis foin des anachronismes, la Shoah de 40-45 est mise en parallèle avec l’actuel conflit Palestinien. Comme pour banaliser la première et mettre le second à charge des disparus dans les camps d’extermination.
Enfin, juste une petite touche supplémentaire d’antisémistisme "classique" en assimilant les victimes juives et l’argent (De Wever reproche à Patrick Janssens des excuses "gratuites", jouant pleinement avec les équivoques).

Octobre 2012. Bart De Wever emporte les élections communales (municipales) à Anvers. Il en devient le nouveau bourgmestre.
Son premier geste à la proclamation de ces élections : organiser une marche de deux kilomètres sur l’Hôtel de Ville.
Octobre 1922. La marche sur Rome des chemises noires.
Le parallèle choqua aussitôt. Mais ce soir de victoire, De Wever ne voulait pas parler à la presse francophone. Vous n'entendrez donc pas ses tours de passe-passe verbaux pour nier la moindre ressemblance (tout en s'en réjouissant dans les coulisses de son théâtre nationaliste).



Jean Echenoz,
14
,
Minuit, 124p.


Jean Echenoz

Son dernier roman : 14. Extrait :

- "Tout cela ayant été décrit mille fois, peut-être n'est-il pas la peine de s'attarder encore sur cet opéra sordide et puant. Peut-être n'est-il d'ailleurs pas bien utile non plus, ni très pertinent, de comparer la guerre à un opéra, d'autant moins quand on n'aime pas tellement l'opéra, même si comme lui c'est grandiose, emphatique, excessif, plein de longueurs pénibles, comme lui cela fait beaucoup de bruit et souvent, à la longue, c'est assez ennuyeux."

Colin Farmer


Le 12 octobre, ce grand-père de 62 ans marchait dans Chorlay, localité du Lancashire. Cet aveugle s’aidait de sa canne blanche pour se déplacer (et signaler son handicap).
Las, à force de s’entendre seriner (ou de colporter) des discours populistes sur l’insécurité, de «braves gens» firent appel à la police. Au début d’une rue de Chorlay, cet aveugle s'avançait donc, canne blanche devant lui. Au milieu de la rue, des passants ne virent, eux, qu’un sabre de Samouraï tendu par Colin Farmer. Et à la fin de la rue, un policier dégaina son Taser pour offrir à l’aveugle une décharge de 50.000 volts. La fée électricité envoya le malheureux à l’hôpital.
Une "bavure".
Pas question de délation de notre part, mais la vue de ce policier ne laisserait-elle pas à désirer pour en arriver à confondre canne blanche et sabre japonais ?

Michaël Foessel

Interview par Alexandra Schwartzbrod et Cécile Daumas dans le Libération du 15 octobre :

- "Pour de nombreuses raisons, la catastrophe s’est substituée au paradigme du progrès : épuisement du modèle de croissance, sentiment révolutionnaire perdu, perception de plus en plus négative de la technique, dépolitisation… L’idée de catastrophe revient dans la modernité tardive de sociétés fatiguées d’elles-mêmes. C’est pourquoi la fin du monde est une perception très occidentale, symptomatique d’un certain psychisme européen : une impression d’avoir passé son tour dans l’histoire universelle, d’avoir essayé de transformer le monde mais d’avoir abouti à une catastrophe (URSS, nazisme).

L’homme sans monde, c’est l’homme séparé de ce qu’il peut."

Ma Guhl

20 ans. Afghane. Décapitée pour avoir résisté à sa belle-mère, laquelle voulait l’obliger à des rapports sexuels avec un autre homme que son mari.
Les deux « beaux »-parents, le mari et l’assassin ne seraient plus en liberté. Le tueur affirme avoir été manipulé par la belle-mère accusant Ma Guhl d’être une prostituée.
Directeur régional de la commission des droits de l'homme, Abdul Qader Rahimi confirme qu’en 2012, une centaine de cas de violence contre les femmes ont déjà été enregistrés dans l'ouest de l'Afghanistan…
Les faits se sont déroulés à Hérat. A quand un jumelage avec Sète ?

Le maire et la mère des batailles contre le mariage d'homosexuels

François Commeinhes, gynécologue. Maire de Sète, il vient d’accoucher de cette élégante formule :
- "les gays femelles"
en expliquant qu’il ne procèderait pas à des mariages entre lesbiennes.
Voilà, si elle convole en « justes » noces avec un homme, une femme est une femme. Si elle préfère conjuguer sa vie avec une autre femme et non avec un homme, nous retournons dans le règne animal et ce n’est plus qu’une histoire de "femelles".

Mo Yan

Prix Nobel de Littérature 2012.
L’Académie suédoise :
- "Avec un réalisme hallucinatoire, Mo Yan unit le conte, l'histoire et le contemporain.
Il a créé un univers qui, par sa complexité, rappelle celui d'écrivains tels William Faulkner et Gabriel Garcia Marquez, tout en s’ancrant dans la littérature ancienne chinoise et la tradition populaire du conte."

J’ignorais que Mo Yan est en vérité un pseudonyme. Sa signification : « Ne parle pas… ».
Sur les registres d’état civil chinois, les parents du futur prix Nobel l'avaient déclaré sous le nom de Guan Moye.



Leib Rochman,
A pas d'aveugles de par le monde,
Préface d'Aharon Appelfeld,
Denoël & D’Ailleurs, 831 p.


Aharon Appelfeld


Préface. Extrait :

- "Après l'expérience de l'Anéantissement, il n'y a plus de surprise. L'harmonie est ridicule. Coutume signifie lieu commun. L'explication psychologique n'est plus qu'une mince pellicule (...). En d'autres termes : les convenances esthétiques, morales, religieuses sont mortes, et celui qui s'en tient encore à elles pèche par anachronisme."

Leïb Rochman

A pas d’aveugles de par le monde. Extrait :

- "C’est nous qui écrivons la Chronique du monde. Elle se divise en chapitres selon les persécutions, les massacres, les expulsions et, rarement, selon la bienveillance à notre égard. Nous sommes l’arbre dont se nourrit le monde.
Quand ils brûlent nos livres, c’est leur propre Chronique qu’ils brûlent.
(…)
Peut-être serait-il plus intéressant de décrire le lien entre le destin d’un peuple et celui de ses livres. On ne cesse de brûler le corps des uns et des autres, mais les lettres et l’âme prennent leur envol et demeurent."



Sur fond authentique de manifestation appelant à la mise à mort du "chien" Rushdie, graphisme JEA (DR).

Salman Rushdie

En pleine paupérisation, la prime pour la mise à mort (par lent égorgement, empalement progressif, empoisonnement subtil etc, le choix est libre) de Salman Rushdie, vient d’être portée par les mollahs iraniens à 3.300.000 dollars.
Vous hausserez les épaules en murmurant : bof, c’est en l’Iran, chez ces Iraniens-là.
Mais à Paris, chez ces Français-ci, l’Institut du monde arabe annonçait un Festival : « Vingt-cinq ans de créativité arabe ». Avec notamment une vidéo de Mounir Fatmi : « Sleep ».
Qui dort ? Salman Rushdie. Quoi, il trouve le sommeil malgré la fatwa le frappant de plein fouet ? Scandalisés rien qu’à l’idée de voir Rushdie dans les bras de Morphée (sans voile), les intégristes de service ont rappelé que la vidéo, ça ne sert qu'à faire chanter en montrant des otages terrorisés.
Aussitôt, l’Institut a déprogrammé « Sleep » au motif que cette vidéo était effectivement « trop sensible »…
Morale de cette fable authentique : méfiez-vous de l'écrivain qui dort, un bon écrivain est un écrivain mis à mort !!!
Qu’il nous soit permis une humble remarque. Le Festival se serait grandi en remplaçant ce « Sleep » par un long métrage pakistanais : «Guérillas internationales ». Voilà un chef d’œuvre du 7e art. Salman Rushdie s’y trouve décrit en alcoolique diabolique (quelle richesse dans la rime) complotant contre l’Islam. Mais la justice divine va passer et l’écrivain trépasser.

NB : Vient de paraître son Joseph Anton, Plon, 736 p.



Gonçalo M. Tavares,
Un voyage en Inde,
Ed. Viviane Hamy, 492 p.


Gonçalo M. Tavares

Un voyage en Inde. Extraits :

- "Qu’est-ce qu’un jour sinon un jeu de dés entre la volonté et la matière ?"

- "Il est indispensable de donner à connaître les actions terrestres
avec la longueur du monde et la hauteur du ciel,
mais il importe également de parler de ce qui n’est
ni si long ni si haut.
Certes, les Grecs tentèrent de porter à leur perfection
aussi bien la Vérité que le geste ;
pour autant, ce sont de loin les idées qui furent le plus
profondément bouleversées.
Aussi le temps est-il venu de mettre la Grèce
la tête en bas
et de lui vider les poches..."

- "La journée de demain n’est pas un musée."

Olga Tokarczuk

Sur les ossements des morts. Extrait :

- "Il n’est pas simple de discuter avec certaines personnes, surtout de sexe masculin. J’ai ma théorie sur le sujet. L’âge venant, beaucoup d’hommes souffrent d’une sorte de déficit, que j’appelle «autisme testostéronien». Il se manifeste par une atrophie progressive de l’intelligence et de la capacité à communiquer, et cela handicape également l’expression de la pensée. Atteint de ce mal, l’homme [...] s’intéresse à la Seconde Guerre mondiale et aux biographies de gens célèbres, politiciens et criminels en tête."


Olga Tokarczuk,
Sur les ossements des morts,
ED. Noir sur Blanc, 304 p.



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jeudi 20 septembre 2012

P. 183. "Après la bataille" de Yousry Nasrallah


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(DR).

Synopsis

- "Mahmoud est l'un des cavaliers de la place Tahrir qui, le 2 février 2011, manipulés par les services du régime de Moubarak, attaquèrent les jeunes révolutionnaires à dos de chameau. Tabassé, humilié, sans travail, ostracisé dans son quartier qui jouxte les Pyramides, Mahmoud et sa famille perdent pied. C'est à ce moment qu'il fait la connaissance de Reem, une jeune égyptienne divorcée, moderne, laïque, qui travaille dans la publicité, milite pour l'écologie et vit dans les beaux quartiers."

Yousry Nasrallah

- "Tout mon cinéma travaille à essayer d’extraire le peuple égyptien de la place de la victime."
(les inRocks, 19 septembre 2012).

- "Une dictature, ça vous fait vous haïr vous-mêmes. Le peuple mérite cette lettre d'amour que nous lui avons faite dans le film".
(Le Point, Festival de Cannes, 17 mai 2012).

- "Se libérer, rompre les tabous, dépasser la censure. C’est, à mes yeux, la définition première du nouveau cinéma arabe."
(La Croix, Festival de Cannes, 7 juin 2012).

- "C'est ce qu'on a vécu pendant la Révolution. Elle était belle ! Pendant 18 jours on avait l'impression et l'illusion peut-être que tout ça avait sauté, les barrières entre classes, les genres, entre l'homme et la femme et les ethnies évidemment … On a envie de revivre ça, que ça soit constant, que ça reste, que ça ne soit pas illusoire, pas seulement 18 jours de folie."
(AFP).

CinéObs

- "Avec seulement cinq pages de scénario, Yousry Nasrallah a tourné sa fiction en même temps que les événements se produisaient, filmant place Tahrir, écrivant, avec son co-scénariste Omar Shama, les scènes la nuit précédant le tournage ou allant jusqu'à laisser ses acteurs «  travailler en incarnant des idées ». Au fil des deux heures du film qui montre le rôle des femmes dans la Révolution, il tente de « familiariser le spectateur avec ce qu'est un Egyptien aujourd'hui ».
(Festival de Cannes, 18 mai 2012).

Thomas Sotinel

- "Le cinéaste a toujours travaillé ces contradictions, ces injustices (mais aussi cette culture, cet humour, cette esthétique) qui font l'identité égyptienne. Il en a fait des fictions qui assument leur parenté avec la tradition du cinéma arabe, et Après la bataille ne fait pas exception à cette manière de faire."
(Le Monde, Festival de Cannes, 8 mai 2012).

Siegfried Forster

- "Après la bataille dresse un constat sans aucune illusion : la véritable révolution n’a pas encore eu lieu, « ce qui a commencé c’est le sentiment révolutionnaire », conclut Yousry Nasrallah sous le slogan : « Pain, Liberté, Dignité, Humanité ».
(RFI, 18 septembre 2012).


Petit prince égyptien : "Dis, tu me dessines un printemps révolutionnaire ???" (DR).

Didier Péron

- "Le héros de l’histoire (…) n’est pas un jeune protestataire de la place Tahrir rempli d’une soif inextinguible de démocratie mais Mahmoud, un cavalier du quartier des Pyramides, au Caire, qui a participé à l’assaut spectaculaire à cheval et à dos de chameaux contre les protestataires réclamant le départ de Moubarak, le 2 février 2011. Mahmoud, pas armé, manipulé par le caïd du coin, est tombé de sa monture, la foule enragée l’a battu et il est revenu dans son misérable quartier de Nazlet la queue basse. Déprimé, rasant les murs, il rencontre Reem, fille émancipée des beaux quartiers qui bosse pour une ONG d’aide aux déshérités de la ville, en particuliers de Nazlet, quartier qui concentre la population des guides touristiques travaillant sur le site de Gizeh et que les attentats islamistes puis les manifestations ont mis sur la paille."  
(Libération, 18 septembre 2012).
 
Jacques Mandelbaum 

- "Les événements historiques se captent aujourd'hui en direct. Images sur le vif, reportages, voire documentaires, ont ainsi rendu compte très tôt, très vite, très bien et très mal à la fois, du "printemps arabe". C'est désormais au tour des premières fictions de nous parvenir. D'Egypte - où les manifestants de la place Tahrir ont délogé Hosni Moubarak le 11 février 2011 - arrive, un an et demi plus tard, le nouveau film de Yousry Nasrallah. Il n'y a pas si longtemps, on aurait parlé d'un film réalisé à chaud. Tout va si vite aujourd'hui dans la médiatisation des événements que ce délai suffit à en faire une oeuvre froide, quasiment anachronique, tant du point de vue du passé (déjà montré ailleurs) que du présent (l'histoire toujours en marche après la réalisation du film). Nasrallah - élève et successeur du grand Youssef Chahine au pays des pyramides - est un cinéaste trop averti des réalités de son temps pour l'ignorer. Judicieusement, il nomme son film Après la bataille.
Il pose, ce faisant, le temps nécessaire à la fiction. Un temps pour l'intelligibilité du fait collectif, d'une part, pour l'individualisation romanesque de l'autre."
(Le Monde, 18 septembre 2012).

Laure Dalzane

- "Le film de Nasrallah (…) nous invite à quitter le point de vue du spectateur du JT de 20 heures, confondant tous les protagonistes dans une indistinction réductrice, et nous convie à observer de l’intérieur les contradictions de la société égyptienne : la lutte des classes, la guerre des sexes, la coexistence entre extrême modernité des mœurs et archaïsmes, les manipulations en tous genres, comme celle du riche et cynique propriétaire Haj Abdallah, qui retourne sa veste toujours du bon côté en fonction de ses intérêts financiers… Les personnages échappent à un schématisme qu’on craint au départ, grâce à la façon dont Nasrallah leur offre le temps d’évoluer, de douter, de se remettre en question tout au long du film.
Si le film de Nasrallah ne s’impose toutefois pas par la maestria incontestable de sa mise en scène, il nous touche par sa belle vitalité, par ses acteurs entièrement engagés, par l’urgence enfin que l’on sent chez Nasrallah à se battre pour éviter la confiscation par les Islamistes de cette Révolution du peuple arabe. Après la bataille, c’est encore à coup sur… une âpre bataille qui se profile. Yousri Nasrallah en témoigne par les moyens du cinéma, et nous émeut."
(Mediapart, Festival de Cannes, 26 mai 2012). 
 
Mena Shalaby - Reem (DR).

Didier Péron

- "La relation entre Mahmoud, l’impulsif, le prolo floué, et Reem (la vedette Mena Shalaby), si occidentalisée qu’on la prend pour une «Libanaise», ressemble à une improbable idylle édifiante, scellant la réconciliation du peuple et de la bourgeoisie. Mais les allers-retours entre l’existence nantie de Reem et la maison rudimentaire de la famille de Mahmoud pointent aussi le fossé qui sépare des individus qui doivent, face à la dictature, s’inventer une communauté de destin. On sent que ça ne va pas être évident, même si les jeunes branchés donnent des leçons de syndicalisme aux cavaliers de Nazlet (le film a été tourné avec les habitants de ce quartier peuplé de Bédouins sédentarisés depuis le XIXe siècle).
En dernier lieu, c’est l’armée et les islamistes qui sont les ennemis à circonvenir et qui bien entendu tirent en coulisse leurs épingles du jeu. La fièvre verbale s’explique alors par la menace qu’ils font peser sur le peuple à qui, par les armes ou la théologie, il demande à chacun de la fermer et d’obéir. Nasrallah et ses actrices ont dû stopper les séquences tournées en vidéo lors de la manif du 8 juillet 2011, insultés et battus par des gens défendant des intérêts qu’on a du mal à imaginer démocratiques."
(Libération, Festival de Cannes, 17 mai 2012).

Serge Kaganski

- "Il est vrai que la mise en scène de Nasrallah est bordélique, truffée de zooms intempestifs, faux raccords, rythmes heurtés… mais quelle énergie, quel à propos politique et quelles actrices ! Film feuilletonesque entre Plus belle la vie cairote et Mocky oriental, Après la bataille nous dit que l’avènement de la démocratie et de l’émancipation des peuples durera plusieurs printemps. Yallah !"
(les inRocks, Festival de Cannes, 19 mai 2012).

Gaël Golhen

- "En synthétisant le film politique rosselinien et le soap égyptien (bariolé, vivant, lacrymal) Nasrallah réussit un OVNI, déconcertant, parfois lessivant, et qui malgré la confusion du propos laisse quelques traces indélébiles…"
(Première, Festival de Cannes, 17 mai 2012).

Pascale Fautrier

- "Beau mélodrame à voir sur les contradictions sociales de l'Egypte quelques semaines après le printemps arabe, fait d'un mélange d'images filmées au moment de la Révolution et de fiction. Les trois comédiens principaux sont excellents. La Révolution n'a pas commencé, ce qui a commencé, c'est le sentiment de la Révolution, dit le réalisateur Yousry Nasrallah. Reste la montagne à gravir, plus haute que les Pyramides : rocher de Sisyphe. Un film contre le découragement."
(Mediapart, 11 septembre 2012).





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