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Les hommes de Napoléon, Témoignages 1805-1815, omnibus, 2001, 941 p.Présentation par omnibus :
- "Ceux qui l'ont suivi jusqu'au bout racontent. 900 pages de souvenirs, extraits de Mémoires, de Souvenirs et de lettres intimes choisis de façon à raconter toute l'histoire de la Grande Armée depuis 1805 jusqu'à 1815."
4e de couverture :
- "Silvain est un soldat de seize ans, engagé volontaire. Jean-Marie est un briscard de trente ans, grognard de la Vieille Garde. Adam est officier d'ordonnance auprès de l'Empereur. La Flize est chirurgien major. Ils viennent de Provence, du Jura, du Nord, de toute la France. Tous, ils l'ont suivi jusqu'à Moscou en passant par Austerlitz, Iéna, Wagram, mais aussi Madrid et Baylen. Ils le suivront encore au-delà de la Bérézina et, pour finir, à Waterloo... Ce sont les hommes de Napoléon.
Un jour, ils ont posé les armes. Ils ont vieilli. Et, par chance pour nous, ils se sont finalement décidés à écrire leurs souvenirs, les meilleurs ? ah ! le soleil d'Austerlitz ! ? et les pires : la boue, la glace, le sang.
Ces souvenirs sont une mine d'or de la mémoire. Voici les plus émouvants d'entre eux, extraits et agencés de façon à écrire l'histoire de la Grande Armée. Mis bout à bout, ces documents devenus introuvables, dénichés au fond des archives, font l'effet d'un grand film épique. Pour un peu, on entendrait cliqueter les sabres !
Présenté par Christophe Bourachot."
Un jour, ils ont posé les armes. Ils ont vieilli. Et, par chance pour nous, ils se sont finalement décidés à écrire leurs souvenirs, les meilleurs ? ah ! le soleil d'Austerlitz ! ? et les pires : la boue, la glace, le sang.
Ces souvenirs sont une mine d'or de la mémoire. Voici les plus émouvants d'entre eux, extraits et agencés de façon à écrire l'histoire de la Grande Armée. Mis bout à bout, ces documents devenus introuvables, dénichés au fond des archives, font l'effet d'un grand film épique. Pour un peu, on entendrait cliqueter les sabres !
Présenté par Christophe Bourachot."
Laurent Lemire :
- "Cette anthologie nous fait entendre des voix inconnues, venues des douleurs de la guerre. Pas des penseurs, pas des généraux, mais des grognards qui grognent, de jeunes officiers qui officient, des soldats qui bavardent, des hommes qui marchent près de 40 kilomètres par jour et qui, harassés mais portés par un dessein et un destin qui leur échappent, semblent toujours prêts à crier «Vive l'Empereur!».
Nous avons tellement lu les témoignages des poilus de 14-18 sur la violence des tranchées que nous en avons presque oublié le carnage derrière la grande geste napoléonienne, les convois qui roulent sur les cadavres et font craquer les corps des cuirassiers, les mares de sang et de boue mêlés, les mutilés qui continuent de ramper sous le tonnerre des canons, le jeune chirurgien qui résume Eylau à «une vraie boucherie» ou cet officier qui avoue avoir tué 242 ennemis à l'arme blanche.
Lors de la campagne de Russie, qui fit 200.000 morts côté français, les grognards mangèrent pour la première fois du cheval. En Espagne, où le typhus s'invita, ce fut pire. Sur l'île de Cabrera, dans l'archipel des Baléares, quelques prisonniers français tirèrent au sort des «volontaires» qui acceptèrent de mourir pour servir de nourriture aux autres. «On enlevait à ceux désignés par le sort, les cuisses, jambes et bras que l'on faisait rôtir sur un feu avec du bois de sapin.»
Tous ces textes ont été publiés, dans des livres, dans des revues, puis oubliés depuis la fin du XIXe siècle. Au terme de dix ans de recherche, Christophe Bourachot leur redonne vie en montrant la permanence de la bravoure et de la mort dans cette conquête impériale. D'Austerlitz à Waterloo, tout cela est raconté par ceux qui ont vécu et souffert pour le Petit Caporal, dans une dévotion quasi sacrificielle. Une épopée que l'on reçoit comme un vrai choc."
(Le Nouvel Observateur, 28 avril 2011).La Bérézina sous les pinceaux de J. Suchodolski, 1866 (DR).
Le 27 novembre 1812
le sergent Bertrand
arrive sur la Bérézina...
- "La journée se passe à changer de positions, et à échanger quelques coups de feu avec l'ennemi. Le soir, la division établit ses feux de bivouac sur la lisière d'un grand bois. Nous avions là de gros et vieux chênes pour nous chauffer, mais rien à manger.
Au moment où je m'apprêtai à dormir devant un bon feu, on m'apprend qu'une de nos cantinières, Louise, est sur le point d'accoucher et souffre beaucoup. Tout le régiment (1) s'émeut et s'ingénie pour secourir cette malheureuse femme qui se trouve sans nourriture, sans un abri, sous ce ciel de glace. Notre colonel (Romme) donne l'exemple. Nos chirurgiens, n'ayant plus leurs paniers d'ambulance, abandonnés à Smolensk, faut de moyen de transport, reçoivent des mains de tous des chemises, des mouchoirs, tout ce qu'on peut donner. J'avais remarqué près de nous un parc d'artillerie (...). J'y courus, et, m'emparant d'une couverture placée sur le dos d'un cheval, je revins à toutes jambes la porter à Louise. J'avais commis une mauvaise action, mais je savais que Dieu me le pardonnerait en faveur du motif.
J'arrivai au moment où notre cantinière mettait au monde, sous un vieux chêne, un enfant mâle bien constitué, que je rencontrai en 1818 enfant de troupe dans la légion de l'Aube. Ainsi notre brave Louise donna un défenseur de plus à la Patrie dans l'un des moments les plus critiques où se soient trouvés les débris de la Grande Armée."
(PP. 405-406).
- "Le 29 novembre, nous nous présentions à l'entrée des ponts, et j'ai vu, à ce moment, de mes yeux vu, un spectacle d'une telle horreur, qu'après cinquante ans, ma plume peut encore à peine le reproduire. Une masse de malheureux, officiers et soldats de toutes armes blessés, employés, femmes, enfants, en proie au froid, à la faim, auraient pu passer, la veille, sans encombre, mais rien n'avait pu les arracher des feux autour desquels ils reprenaient un peu de vie. Ils se pressaient maintenant pour franchir les ponts. Aux abords de ceux-ci, les cadavres de ceux de cette lamentable foule qui avaient déjà succombé pendant la nuit, avaient été foulés aux pieds par la cavalerie et l'artillerie. On voyait des têtes, des bras, des jambes épars, une boue sanglante !!!"
(P. 406).
Peter von Her, 1843 (DR).
Le lieutenant Danel,
24 ans,
ne pense plus qu'au suicide...
- "J'étais seul (2) au milieu d'une multitude égarée et affamée, ne pouvant me soutenir à cheval tant j'étais faible par suite d'une maladie des entrailles, étant obligé de m'y maintenir sur le ventre, les bras d'un côté, les jambes de l'autre, laissant à ma monture le soin de suivre à sa volonté la colonne de soldats sans armes et démoralisés, au milieu desquels je passai une cruelle nuit, tant bien que mal, ne pouvant que parler inintelligiblement.
(...) Succombant à l'influence de sinistres pensées, je m'arrêtai, déterminé à mettre fin à une si pénible situation. Assis sur un tertre, au bord de la route, les rênes de mon cheval passées dans le bras gauche, un pistolet armé dans la main droite, j'attends pour exécuter mon projet de destruction que des voltigeurs qui faisaient l'arrière garde eussent défilé.
(...) Mes larmes coulèrent.
Déjà les lances des cosaques apparaissaient sur le monticule qui dominait la route et qui se trouvait à trois ou quatre portées de mousquets de moi; je les voyais arriver avec calme et résignation, ne voulant accomplir mon oeuvre que lorsqu'ils seraient à dix pas.
Tout à coup, un colonel descendant de ce monticule au galop, m'apercevant dans une complète immobilité se dirige vers moi et s'écrie :
- Que faites-vous là, Monsieur l'officier ? A cheval ! Vite à cheval !
Je l'examine sans bouger et reconnais le brave colonel Robert, aide de camp du général Belliard (3). Il me reconnaissait lui-même et me dit en apercevant mon pistolet dans ma main :
- Qu'alliez-vous faire, malheureux ?
Il avait deviné mes intentions.
- Ah ! C'est affreux, vous, Daniel, un brave soldat qui avez fait preuve de tant d'énergie et d'abnégation, finir ainsi votre honorable carrière. Ah ! C'est indigne de vous..."
(PP. 410-411).
Fuite de Napoléon quittant les restes de son armée à Smorgoni (DR).
NOTES :
(1) Vincent Bertrand (1786-1864) entra en 1805 au 7e régiment d'infanterie de ligne dont il portera l'uniforme jusqu'en 1815. Il terminera sa carrière militaire en 1838 avec le grade de capitaine du 43e RI.
La première publication de ses Mémoires remonte à 1909.
(2) De prénom inconnu, Danel est entré à l'armée en 1806 dans les gendarmes d'ordonnance à cheval de la Garde impériale. En 1812, il est lieutenant au 9e régiment de hussards. Il participera à la bataille de Waterloo comme aide de camp du général Lebrun. Sa mort interviendra après 1854.
Il faudra attendre 1952 pour que son témoignage soit enfin publié pour la première fois (Carnet de la Sabretache).
(3) Augustin-Daniel Belliard (1769-1832). Premier ambassadeur de France à Bruxelles après la révolution belge de 1830.
La rue portant son nom ne laisse pas que de bons souvenirs aux enseignants francophones du Royaume de Belgique.
A noter que Chantal Serrière a consacré l'une des dernières pages de ses "Ecritures du Monde" à l'Histoire d'un conscrit de 1813, roman d'Erckmann et Chatrian.
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900 pages - une somme où venir picorer !
RépondreSupprimer@ brigetoun
RépondreSupprimeret en petits caractères d'imprimerie...
Un livre référence, mes souvenirs les plus vifs sont dans Guerre et Paix , de quoi élargir le point de vue
RépondreSupprimerles illustrations sont superbes
Il neigeait ........un poème appris en matière de punition en pension, les punitions ont parfois du bon
@ Dominique
RépondreSupprimermerci pour avoir pensé à un croisement des regards français et russes
une méthode d'ailleurs historique (mais pas une exclusivité) qui ébranle les propagandes, les préjugés, les dénonciations unilatérales...
Terribles témoignages, indispensables à notre époque où l'on se vante de faire "des guerres sans morts"...mais d'un seul côté bien sûr!!!
RépondreSupprimer@ Colo
RépondreSupprimerDans son tombeau, Napoléon a entraîné un million de cadavres portant l'un des uniformes de ses armées...
Je ne sais plus qui a inventé ce surnom (mais ce n'est pas gentil de s'attaquer au physique des gens...) pour un de nos homme politiques contemporains : Naboléon.
RépondreSupprimer@ Dominique Hasselmann
RépondreSupprimer"Du haut de cette pyramide de cadavres...",
Napoléon pouvait se passer de talonnettes !!!
Mon arrière-grand-père l'a accompagné jusqu'à sa dernière demeure. Il n'a pas pu témoigner.
RépondreSupprimer"On tue un homme, on est un assassin. On tue des millions d'hommes, on est un conquérant. On les tue tous, on est un dieu." (Jean Rostand, "Pensées d'un biologiste")
RépondreSupprimerTémoignages terribles...
@ Danièle Duteil
RépondreSupprimerSauf erreur catastrophique, il serait temps de vous souhaiter le plus apaisant des anniversaires...
@ Tania
RépondreSupprimerA vous lire je réalise cruellement que jamais je n'ai proposé du Rostand (le philosophe-scientifique) lors de mes cours !!! Manque irréparable.
@ JEA,
RépondreSupprimerMerci ! Ce fut un très bel anniversaire.
Ce qui pousse les hommes à suivre un grand chef ?
RépondreSupprimerL'illusion d'écrire à partir de petites histoires un paragraphe de la grande ?
Seul le temps qui passe peut consacrer cela.
Hommage à ces hommes qui ont souffert sans vraiment savoir pourquoi.
La mélagomanie et le pouvoir n'ont même pas la pudeur de se cacher.
@ saravati
RépondreSupprimerpresque hors sujet mais en lien direct avec le coq hardi de l'un de vos blogs
une recette que vous demandiez mais qui n'est pas d'un grand chef :
quelques crêtes de coq à l'impériale
vous élisez une douzaine de crêtes de coq
enfermées dans une sorte d'étamine, vous plongez ces crêtes dans de l'eau bouillante et ce pendant 8 minutes
ensuite vous frottez les dites crêtes au sel pour qu'elles perdent leur rouge révolutionnaire
une fois portées pâles, vous abandonnez ces crêtes dans de l'eau froide
elles auront alors deux heures pour dégorger
puis dans un litre de bouillon (à base de carcasse de poulet à défaut de coq) vous imposez 45 minutes de cuisson aux crêtes qui n'en mèneront pas large
reste à élaborer une sauce selon vos goûts (madère-champignons p. e.)
@ JEA
RépondreSupprimerMerci pour cet interlude gourmand !
Le lien ? L'arrogance des chefs qui rend leur ego aussi rougeoyant qu'une crête...
Les peintures, gravures ou illustrations de l'époque (19 ième) qui relatent les faits de la "Grande Armée" sont bien gentilles.. on ne voit que des colonnes de soldats, des officiers à cheval, un peu de fumée au loin et à l'avant-scène deux trois cadavres... où sont le sang et le carnage ? les entrailles éventrées, les bras amputés, la cervelle éclatée ?? le récit écrit de ces témoins, c'est cela la réalité !
RépondreSupprimerDe l'art à la douleur de la guerre...
RépondreSupprimer@ MH
RépondreSupprimerDans les années 80, un réalisateur belge a signé un documentaire sur le sort si peu enviable des blessés le plus souvent abandonnés en nombre invraisemblable sur les champs de batailles à l'époque napoléonniène.
Problème concret, ce réalisateur souhaitait des gros plans de blessures bien écoeurantes.
Finalement, il fut procéder à l'achat de moultes carcasses de porcs. Revêtus d'uniformes, ces cochons furent ensuite écorchés comme pas possible et maquillés de matières sanglantes...
A l'écran, c'était très très convainquant. Un jambonneau tranché et bien rose-rouge ressemblait à s'y méprendre à un bras coupé par un sabre particulièrement bien aiguisé.
@ Otli
RépondreSupprimeret des douleurs aux horreurs...