MO(T)SAIQUES 2

"Et vers midi
Des gens se réjouiront d'être réunis là
Qui ne se seront jamais connus et qui ne savent
Les uns des autres que ceci : qu'il faudra s'habiller
Comme pour une fête et aller dans la nuit ..."

Milosz

lundi 19 août 2013

P. 258. je, tu, il, nous, vous, elles...


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(Ph. JEA/DR).




Aucun besoin de réveil
avidement chagrin
ni de sirène hurlant
sa migraine
pour que chaque matin
je salue la lumière
par un gargantuesque
pied de nez destiné
à ce destin requin
qui amputerait volontiers
mes lendemains de leurs
deux mains…

tu m’écris rarement
mais invariablement
des lettres invisibles
et introuvables
partout ailleurs
avec des mots de vanille
et de sureau
nés de tes seins cristallins
ces encriers
qui inspirent
la rondeur des océans
et attirent la transhumance
des terres

il n’a pas du tout neigé
ce mois d’août
alors pourquoi
s’il vous plaît
toutes ces étoiles
ayant perdu le nord
jusqu’au bord d’un silence
éphémère
et qui se laissent tomber
avec des yeux
de moins en moins
méconnaissables ?

quand elles se maquillent
maladroitement
et s’accoutrent
en courtisanes
pour une croisière
aux couleurs catastrophiques
les douleurs ne comprennent pas
pourquoi et comment
au lieu de trimer
dans leurs galères
et de nous laisser pendre
à leur misaine de misère
nous ne trahissons aucune
de nos tragi-comédies
surtout les plus rebelles
celles qui font le mur
et l’affiche rouge

à vous voir cloués
handicapés chaplinesques
au centre d’une étroite
et seule clairière
clairsemée de chardons
et de tristes intentions
les braconniers vous supposent
à tort mais non sans raisons
nés de la dernière pluie noire
incapables de dépasser
la première de vos ombres
même la plus oncogène
et de lui retirer son masque
glaçant les sangs
les plus grimaçants
pour lui offrir un aller
décalé pour Venise
et un retour aux sources

leurs lèvres
comme des livres
leurs douceurs à fleur de peau
elles architecturent leurs blogs
où se blottissent
comme sur des îles
illimitées
tous les oiseaux
ces violoncellistes de blues
ou ces choeurs baroques
ni troupeaux, ni appeaux
ni colonies
ni coquilles vides
juste des notes impalpables
et imprévisibles
en bas de page
en haut vol...




(Ph. JEA/DR).


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37 commentaires:

  1. un bain de poésie qui me rafraichira cette semaine

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    1. j'avais cru comprendre que cette semaine, le lac d'Annecy vous ouvrait ses (presque) bras de mer

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    2. et votre blog participe au pluriel de "elles"

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  2. Conjuguer la lumière et les ombres
    Passer des livres aux lèvres
    Réconcilier le chat et l'oiseau
    Signer JE dit JEA, photographe*
    ou photo-poète

    *(Étymol. et Hist. 1842 (Ac. Compl.), att. une 1re fois en 1836 ds LAND. au sens de « auteur qui écrit sur la lumière » TLF)

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    1. une poésie, chambre noire de l'écriture ?

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    2. et vos textes et vos prétextes s'inscrivent dans le pluriel des "elles"

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  3. Je me suis beaucoup amusée à chercher des images dans ce texte très musical.

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    1. il y a des jardins d'images et des notes comme des être vivants...

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    2. et vos transports immobiles conduisent librement aux "elles"...

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  4. J'adore cette dernière photo, le chat étant à la fois énigme et présence; très beau texte!

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    1. l'oiseau vient des Hautes Fagnes, un plateau marécageux trace d'une calotte glaciaire sur le crâne du Royaume de Belgique
      le chat prenait un premier bain de soleil

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    2. et votre blog élargit le pluriel de "elles"

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  5. Voyages poétiques de Venise à des îles musicales, suivant les étoiles sous le regard attentif, bienveillant du poète et de son chat.
    IL ne se maquille pas, il n'en a pas besoin, ses mots dessinent, colorent avec délicatesse et talent.
    Merci.

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    1. vos espaces et vos instants, même s'ils sont grammaticalement au masculin, enluminent le pluriel des "elles"...

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    2. Venise ? un peu trop tard pour s'y glisser en pénichette de douze mètres, hors saison, dans un chagrin et un crachin qui n'évoluent plus

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  6. Amusant, on cherche des liens, on croit en trouver, on s'égare parmi les musiciens...oiseaux ou interprète.

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    1. pas de risque d'interprétation abusive : le "elles" salue vos précieux carnets et vos voyages

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    2. sinon, le ciel ouvert de la poésie propose des labyrinthes sans entrées sur rendez-vous ni issues fatales...

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  7. JE tue l'ennui de toutes ces fleurs noires
    TU NOU(e)S tout ce qui est en votre pouvoir
    De Vous à Elles le mur se hisse, pierre après pierre
    fleur après fleur,étoile après étoile
    Je(u) le chat en rappel de l'objectif:
    hisser le drapeau des sirènes sur leurs chaises musicales.
    Au plaisir de vous lyre.

    ***
    Tati et Jour de Fête= un régal!

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    1. vous êtes aussi de ces "elles", à Bordeaux, avec des sculptures d'oiseaux lyres...

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    2. se reposer sur des mots comme sur des chaises de passage (les fauteuils sont réservés aux académiciens), des mots qui manifestent, miroitent, scandalisent, rutilent, éclusent, éclaircissent...

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  8. Saluer la lumière par un pied de nez au destin requin,chaque jour est une victoire et votre poésie un antidote à la médiocrité de nos bateleurs officiels. Merci pour les couleurs et la musique.

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    1. André Rollin :
      - "Rien n'est simple; Je voudrais que de longues phrases, avec des labyrinthes et des prairies, arrivent sous ma plume, se déroulent sur le blanc de la page du matin..."

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    2. Votre arbre est au féminin et son singulier élargit ces "elles" qui architecturent leurs blogs indispensables...

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  9. c'est beau ce poème en forme d'hommage à tes blogs amis
    j'aime particulièrement la strophe du JE qui n'a pas besoin de réveil pour saluer la lumière du jour...

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    1. je comme jetable, après avoir avoué
      comme jet-stream, quand on est au courant
      comme jettatura, dans l'oeil d'un mauvais cyclone...

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  10. Je vous avais laissé un message qui s'est perdu dans les affres du net.
    Je disais qu'avec vous, il faut avoir le don d'ubiquité : lire entre les lignes et dans les lignes. Je sens une certaine révolte dans vos propos.
    L'écriture partagée n'est pas un palliatif mais une manière de ressentir et d'être ressenti, une forme de communion de pensées avec toutes les nuances que chacun apporte. Merci de nous accueillir aussi bien et avec tant d'attention.

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    1. pas de lignes jaunes, mais des lignes de la main et/ou des paysages
      ici pas question de garder la ligne
      et si une ligne reste mélodique, c'est qu'elle aura refusé d'être confondue avec une ligne du temps
      enfin soupirer intérieurement si vous l'on vous parle de hors ligne ou s'il vous est demandé de revenir à la ligne

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  11. labyrinthes et prairies, on ne saurait mieux dire, à vous lire, quand l'écriture révèle tant de cheminements et d'images où chacun se blottit, se perd ou se retrouve

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    1. Marguerite Duras :
      - "Ecrire, c'est à la fois se taire et parler..."

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  12. Merveilleuse et poétique façon d'enseigner la conjugaison . Mes élèves auraient apprécié ... Trop tard, pour moi en tout cas !
    Merci JEA.

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    1. enseigner ? une passion partagée par plus d'une commentatrice de ce blog (et par son auteur)
      B. Poirot-Delpech :
      - "L'école sera-t-elle jamais comme la rêvait René Char : à la fois visionnaire et adaptée aux surprises de la terre ?"

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    2. Comme il est raffraichissant d'entendre tant d'amoureux de la POESIE, de phrases, de mots choisis, qui sortent de coeurs tendres, doux, n'offrant pas prise à ce monde de BRUT qui n'appartient qu'au Champagne !! On la croyait morte, enterrée sous les jets de pierres, mais non, elle est bien là, vivante, traversant les siècles sur les ELLES du temps !! Jaime et en Plana !!

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    3. Ce jour-là je veux bien manger mon Bescherelle, mon Bled et toute ma collection de Lagarde et Michard ! ! ! c'est dire mon optimisme !
      Bonne soirée JEA.

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    4. P. Autin-Grenier :
      - "Défroqué enfin de la camisole du quotidien, m'envoler de suite vers des ombres nouvelles sous des cieux de bohème..."

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  13. C'est puissant et fort, mais j'aime particulièrement ce pied de nez gargantuesque au destin. Je vote donc pour le "je" !

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    1. en rhéto, le psy du Centre PMS m'a conseillé de faire le droit à l'université, tu imagines mon incompréhension, et lui de me préciser : "ainsi vous pourrez faire de la politique"
      et voilà qu'après une "carrière" toute autre, je reçois un premier suffrage !!!

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