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Vivaldi et la partition de son Ottone in villa (Mont. JEA/DR).
NAÏVE
- "La création d’Ottone in villa à Vicence le 17 mai 1713 marque le point de départ officiel de la carrière lyrique de Vivaldi. Le Prete Rosso avait alors 35 ans. Un âge avancé si on le compare à celui de la plupart de ses contemporains au moment de leurs débuts à l’opéra. Mais un âge cohérent avec la volonté du musicien de centrer son activité théâtrale sur Venise et de s’y implanter durablement, à la fois comme compositeur et comme entrepreneur d’opéra."
Diapason d’or :
- "Adulé pour ses prestations virtuoses et auréolé du triomphe de l'Estro armonico, le jeune Vivaldi affronte pour la première fois l'arène d'un théâtre en 1713. En prologue d'un accueil triomphal espéré à Venise, il confie prudemment son Ottone in villa à Vicence. Le coup d'essai s'impose par son art de colorer une ligne, de doser l'inflexion qui émeut, mais aussi par des triples croches propres à flatter les gosiers agiles. Vivaldi partage avec Lalli, son sulfureux librettiste, le goût pour les séductrices perverses aux habits d'innocence, dont Cleonilla, voluptueuse maîtresse de l'empereur Ottone, est le parangon. Jeux de l'amour sans aucun hasard entre la dame peu farouche, le beau Caio et son amante Tullia, qui avance masquée. La saveur piquante est apportée par le crédule Ottone, césar des cornuti, qui ne voit rien, et délaisse Rome pour sa béate félicité, au désespoir de son confident Decio."
Opéra International :
- « Ottone in villa », créé au Teatro delle Grazie de Vicence en mai 1713, marque les débuts de Vivaldi dans l'univers de l'opéra. Agé de 35 ans, tout juste nommé maestro de violon à l'Ospedale della Pietà, le compositeur s'est déjà fait connaître par la richesse de ses partitions instrumentales, avec la publication de L'Estro armonico. Son premier dramma per musica, sur un livret de Domenico Lalli, dédié à un aristocrate anglais séjournant en Vénétie, révèle un musicien d'une rare habileté, sachant servir les règles de l'opera seria de son temps avec une certaine originalité. Le livret lui-même qui, pour une fois, ne célèbre pas le triomphe de la vertu, est assez nouveau pour l'époque : faisant l'éloge de la corruption et de l'intrigue, il fut d'abord jugé "amoral" et "anti-héroïque".
L'écriture vocale, de son côté, retrouve toute la chatoyance des concertos et des sinfonie, et la voix est d'emblée traitée comme un véritable instrument. Vivaldi, rappelons-le, connaissait à la perfection les règles du chant, qu'il enseignait aux jeunes filles ospedaliere de Venise. Il imagine donc, pour les cinq personnages principaux de « Ottone in villa », des tessitures assez confortables, mettant l'accent sur la recherche des clairs-obscurs dans le timbre, réclamant tour à tour des chanteurs la précision d'un violon, l'éclat d'une trompette, la suavité d'une mandoline... exigences qui n'effrayaient en aucune manière les créateurs."
(Juin 1997).
Sinfonia d'Ottone in villa dans la version du Collegium Musicum 90 sous la direction de Richard Hickox chez Chandos (DR).
Bertrand Bolognesi :
- "Il serait fastidieux de résumer l’intrigue : on indiquera simplement qu’elle nous mène à Rome, sous le règne d’Othon dont elle conte les amours tumultueuses sur fond de politique. À dessein sa facture est relativement rudimentaire : les commanditaires souhaitaient un ouvrage facile à représenter, sans machinerie, peu coûteux et directement efficace. On reconnaîtra que la proposition de Vivaldi va droit à l’essentiel, filant trois actes rapides qu’occupent cinq protagonistes, sans chœur. Plus précisément, l’écriture avance dans l’action en une succession de récitatifs nerveux et d’arie da capo exprimant chacun un sentiment, une intention, sans nuancer plus profondément."
(Anaclase, 8 février 2004).
Bruno Maury :
- "Quelques mots de l'intrigue, simple dans son principe, mais enrichie de nombreux rebondissements et quiproquos. Cleonilla, maîtresse de l'empereur Ottone, a séduit le beau Caio Silio puis s'est éprise du page de ce dernier, Ostilio. En réalité ce page n'est autre que Tullia, la maîtresse délaissée de Caio…" :
(Muse Baroque).
Camille de Joyeuse :
- "Ottone in villa convoque dans son intrigue un chassé croisé d'émois amoureux dont le trouble favorise chez les personnages et les couples décomposées, recomposés, vertiges et doutes en perspectives. Un temps fort de cette action qui mêle sensualité et cynisme demeure évidemment la scène "fleuve" de l'acte II où Caio, abandonné par Cleonilla, épanche sa plainte désespérée (aria: "L'ombre, l'aure..."), et trouve un écho illusoire en Tullia, cachée dans une grotte: tout le Vivaldi poète et magicien est là, d'une hypersensibilité qui palpite au diapason d'une nature mystérieuse, inspiratrice, miraculeuse: flûtes enchantées, cordes souples et évocatrices... il n'y a qu'un pas avec l'alchimiste démiurge des... Quatre Saisons. La pauvre errance des coeurs et l'éblouissement que suscite la divine nature créent l'un des tableaux les plus saisissants de l'écriture lyrique vivaldienne."
(Classiquenews, 10 novembre 2010).
Aria : "L'ombre, l'aure..."
Danielle Anex-Cabanis :
- "Le livret de Lalli est confus autour d’une histoire de sentiments contrariés, de jalousie et de duplicité avec un happy end qui consacre en fin de compte le triomphe des menteurs et des imbéciles qui veulent bien les croire. Peu importe, cette entrée de Vivaldi dans l’univers de l’opéra se révèle une œuvre fascinante par sa richesse et son inventivité. Vivaldi ose tout et le résultat est littéralement époustouflant : airs de bravoure alternent avec des pièces musicales qui pourraient être autonomes tant elles sont construites avec imagination, en recourant à tous les artifices possibles des instruments et de la voix. A titre d’exemple, on citera le somptueux « Che fé, che amor » de Cleonilla."
(utmisol).
Che fé,
che amor
per te
nel cor,
sempre costante
amante,
riserberò.
Non dubitar
che amar
sempre ti voglio sì,
e se mi ferì
quel vivo cinabro
del tuo labro
ancor l'adorerò.
Pour le vieux phonographe de ce blog, cliquer : ICI.
NAÏVE
- "La création d’Ottone in villa à Vicence le 17 mai 1713 marque le point de départ officiel de la carrière lyrique de Vivaldi. Le Prete Rosso avait alors 35 ans. Un âge avancé si on le compare à celui de la plupart de ses contemporains au moment de leurs débuts à l’opéra. Mais un âge cohérent avec la volonté du musicien de centrer son activité théâtrale sur Venise et de s’y implanter durablement, à la fois comme compositeur et comme entrepreneur d’opéra."
Diapason d’or :
- "Adulé pour ses prestations virtuoses et auréolé du triomphe de l'Estro armonico, le jeune Vivaldi affronte pour la première fois l'arène d'un théâtre en 1713. En prologue d'un accueil triomphal espéré à Venise, il confie prudemment son Ottone in villa à Vicence. Le coup d'essai s'impose par son art de colorer une ligne, de doser l'inflexion qui émeut, mais aussi par des triples croches propres à flatter les gosiers agiles. Vivaldi partage avec Lalli, son sulfureux librettiste, le goût pour les séductrices perverses aux habits d'innocence, dont Cleonilla, voluptueuse maîtresse de l'empereur Ottone, est le parangon. Jeux de l'amour sans aucun hasard entre la dame peu farouche, le beau Caio et son amante Tullia, qui avance masquée. La saveur piquante est apportée par le crédule Ottone, césar des cornuti, qui ne voit rien, et délaisse Rome pour sa béate félicité, au désespoir de son confident Decio."
Opéra International :
- « Ottone in villa », créé au Teatro delle Grazie de Vicence en mai 1713, marque les débuts de Vivaldi dans l'univers de l'opéra. Agé de 35 ans, tout juste nommé maestro de violon à l'Ospedale della Pietà, le compositeur s'est déjà fait connaître par la richesse de ses partitions instrumentales, avec la publication de L'Estro armonico. Son premier dramma per musica, sur un livret de Domenico Lalli, dédié à un aristocrate anglais séjournant en Vénétie, révèle un musicien d'une rare habileté, sachant servir les règles de l'opera seria de son temps avec une certaine originalité. Le livret lui-même qui, pour une fois, ne célèbre pas le triomphe de la vertu, est assez nouveau pour l'époque : faisant l'éloge de la corruption et de l'intrigue, il fut d'abord jugé "amoral" et "anti-héroïque".
L'écriture vocale, de son côté, retrouve toute la chatoyance des concertos et des sinfonie, et la voix est d'emblée traitée comme un véritable instrument. Vivaldi, rappelons-le, connaissait à la perfection les règles du chant, qu'il enseignait aux jeunes filles ospedaliere de Venise. Il imagine donc, pour les cinq personnages principaux de « Ottone in villa », des tessitures assez confortables, mettant l'accent sur la recherche des clairs-obscurs dans le timbre, réclamant tour à tour des chanteurs la précision d'un violon, l'éclat d'une trompette, la suavité d'une mandoline... exigences qui n'effrayaient en aucune manière les créateurs."
(Juin 1997).
Sinfonia d'Ottone in villa dans la version du Collegium Musicum 90 sous la direction de Richard Hickox chez Chandos (DR).
Bertrand Bolognesi :
- "Il serait fastidieux de résumer l’intrigue : on indiquera simplement qu’elle nous mène à Rome, sous le règne d’Othon dont elle conte les amours tumultueuses sur fond de politique. À dessein sa facture est relativement rudimentaire : les commanditaires souhaitaient un ouvrage facile à représenter, sans machinerie, peu coûteux et directement efficace. On reconnaîtra que la proposition de Vivaldi va droit à l’essentiel, filant trois actes rapides qu’occupent cinq protagonistes, sans chœur. Plus précisément, l’écriture avance dans l’action en une succession de récitatifs nerveux et d’arie da capo exprimant chacun un sentiment, une intention, sans nuancer plus profondément."
(Anaclase, 8 février 2004).
Bruno Maury :
- "Quelques mots de l'intrigue, simple dans son principe, mais enrichie de nombreux rebondissements et quiproquos. Cleonilla, maîtresse de l'empereur Ottone, a séduit le beau Caio Silio puis s'est éprise du page de ce dernier, Ostilio. En réalité ce page n'est autre que Tullia, la maîtresse délaissée de Caio…" :
(Muse Baroque).
Camille de Joyeuse :
- "Ottone in villa convoque dans son intrigue un chassé croisé d'émois amoureux dont le trouble favorise chez les personnages et les couples décomposées, recomposés, vertiges et doutes en perspectives. Un temps fort de cette action qui mêle sensualité et cynisme demeure évidemment la scène "fleuve" de l'acte II où Caio, abandonné par Cleonilla, épanche sa plainte désespérée (aria: "L'ombre, l'aure..."), et trouve un écho illusoire en Tullia, cachée dans une grotte: tout le Vivaldi poète et magicien est là, d'une hypersensibilité qui palpite au diapason d'une nature mystérieuse, inspiratrice, miraculeuse: flûtes enchantées, cordes souples et évocatrices... il n'y a qu'un pas avec l'alchimiste démiurge des... Quatre Saisons. La pauvre errance des coeurs et l'éblouissement que suscite la divine nature créent l'un des tableaux les plus saisissants de l'écriture lyrique vivaldienne."
(Classiquenews, 10 novembre 2010).
Aria : "L'ombre, l'aure..."
Danielle Anex-Cabanis :
- "Le livret de Lalli est confus autour d’une histoire de sentiments contrariés, de jalousie et de duplicité avec un happy end qui consacre en fin de compte le triomphe des menteurs et des imbéciles qui veulent bien les croire. Peu importe, cette entrée de Vivaldi dans l’univers de l’opéra se révèle une œuvre fascinante par sa richesse et son inventivité. Vivaldi ose tout et le résultat est littéralement époustouflant : airs de bravoure alternent avec des pièces musicales qui pourraient être autonomes tant elles sont construites avec imagination, en recourant à tous les artifices possibles des instruments et de la voix. A titre d’exemple, on citera le somptueux « Che fé, che amor » de Cleonilla."
(utmisol).
Che fé,
che amor
per te
nel cor,
sempre costante
amante,
riserberò.
Non dubitar
che amar
sempre ti voglio sì,
e se mi ferì
quel vivo cinabro
del tuo labro
ancor l'adorerò.
Pour le vieux phonographe de ce blog, cliquer : ICI.
musique que j'aime - opéra que j'aime (plus que celui de l'avant dernier siècle)
RépondreSupprimersi le cinéma est absent de votre blog, par contre celui-ci offre des fauteuils d'orchestre pour des concerts dont les organisateurs seraient bien inspirés de vous confier la rédaction des présentations...
SupprimerFaut au moins ça pour parler d' Amours !
RépondreSupprimerD'ailleurs, c'est décidé, ne l'écouterais désormais que de cette manière ! :))
Desnos :
Supprimer- "La feuille qui tombe et la roue qui tourne te diront que rien n'est perpétuel sur terre.
Sauf l'amour..."
Vivaldi en ces jours de mai, le changement est aussi musical !
RépondreSupprimerLes programmateurs vont peut-être se souvenir de Nougaro : "Mai... Mai... Mai..."
SupprimerCe qu'il y a de magique chez Vivaldi, c'est que la musique semble couler de source, venir comme cela, naturellement. Le coeur humain vibre immédiatement au diapason de celui du génial musicien.
RépondreSupprimerIl y a un Magnan qui doit encore t'être transmis...
Supprimersinon, ces mots de Christian Bobin :
- "La mort n'efface ni la musique, ni les roses, ni les livres..."
La plainte de Cleonilla est de toute beauté; les chants les plus désespérés...les plus beaux? Je ne sais, mais celui-ci donne la chair de poule. Merci JEA.
RépondreSupprimerSi vous le permettez, j'ai pensé à vous en lisant cette réponse de Carlos Fuentes interrogé sur sa ville préférée :
Supprimer- "Ma ville idéale ? En Europe, ce serait une ville avec théâtre anglais, musique allemande, architecture italienne, cuisine française, et beaucoup d'Espagnols..."
Intéressant...On devrait y ajouter l'art de la gentillesse belge.
SupprimerImaginons alors qu'il passa par le Royaume un jour de pèlerinage de l'Yser, de manif des paysans à Bruxelles, d'incendie des Fagnes... sans pouvoir prendre le tram de la côte, suivre les canaux de Damme puis de Bruges, prendre un pot à la petite fleur de papier mâché, voler en ballon au-dessus de l'entre Sambre-et-Meuse, casser une graine le long de la Semois, se perdre en forêt ardennaise, regarder un film des frères D. à Seraing...
SupprimerQuel plus bel instrument que la voix humaine ?
RépondreSupprimeret cette reconnaissance par Marin Marais :
Supprimerhttp://www.youtube.com/watch?v=SzLFmgsLr4o
Ah ! Marin Marais me fait tout bonnement défaillir...
SupprimerUne intrigue simple, pour un début prometteur. Heureusement reste la musique.
RépondreSupprimeren vérité, le livret n'est qu'un prétexte et ainsi que vous le surlignez, c'est la musique qui se moque des siècles...
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