MO(T)SAIQUES 2

"Et vers midi
Des gens se réjouiront d'être réunis là
Qui ne se seront jamais connus et qui ne savent
Les uns des autres que ceci : qu'il faudra s'habiller
Comme pour une fête et aller dans la nuit ..."

Milosz

vendredi 11 septembre 2015

Fleurs pour adoucir deux ans de son absence inexorable ...



« Une Fleur » un de ses poèmes (juillet 2012) illustré par ses photos
( 2012 / 2013) pour garder au cœur le souvenir de sa douce présence.






                                                                                             Photo JEA/DR©




Une fleur

 

Une fleur offerte à toutes celles et à tous qui hésitent, trébuchent et s’interrogent sur les directions si contradictoires données par la boussole cabossée de leur vie

une fleur pour les interné(e)s et pour les expulsé(e)s par les gardes con-formes de la “préférence nationale”,

une fleur sur la tombe inexistante de ces pyjamas dont les bourreaux s’imprimaient des calendriers pour mille ans






                                                                                            Photo  JEA/DR©


une fleur pour les femmes et une fleur pour les hommes qui ne deviendront jamais des tartufes et ne ressembleront pas à des déserts des tartares
pour rien au monde, ils ne répondront aux invitations à enterrer les pavés de mai

un fleur pour qui ne brade pas son honneur
ne se pavane pas dans des habits brodés de menteries
ne collectionne pas les miroirs en miettes
ne pille pas les pyramides de nos histoires
ne crétinise pas les enfants
ne boit pas avec les marchands des temples

pas une seule fleur pour les monuments constipés et bronzés aux soleils artificiels des champs de batailles ni pour les boniments académiques où excellaient d’ex collabos






                                                                                            Photo  JEA/DR©

mais une fleur pour les peut-être
les on ne sait jamais
les pourquoi pas
les fais bien attention à toi
les je t’aime Toi
les obscures rencontres de midi et les rencontres lumineuses de minuit
les mots nomades avec leurs pieds en sang
les moineaux éparpillés épiés par les empailleurs,

une fleur pour les peurs et les pleurs, pour les rimeurs jamais en règle
pour les rabroué(e)s si pas les saccagé(e)s de la santé,
pour les mystères qui fréquentent assidument les légendes
pour les amours sans bagues et sans bagages
pour les parenthèses entre les pluies, pour les pluies d’étoiles
pour les amies et les amis, ces bateaux en liège et jamais à quai

une fleur dans un encrier de cendres
pour guérir un mauvais œil, dans un sursaut de dignité,
entre deux nuages d’un recueil de poèmes,
entre les dents des vents, entre trois hivers, entre cinq épouvantails,
contre les haleines des haines,

 




                                                                                             Photo  JEA/DR©



une fleur pour un ballet de mon siècle dépassé, pour un orchestre sorti de sa fosse,
pour un musée ouvert aux handicapés, pour un cirque royal ou républicain, pour un amphithéâtre avec des courant-d’air, pour une salle d’opération sans dégâts collatéraux, pour un chandelier aux branches impaires

une fleur tombée dans un fossé qui lui en est reconnaissant

cette fleur devenant une âme de violoncelle athée
un grenier en clair obscur
une île et une morgue sans porte de sortie surmontée d’une horloge




                                                                                             Photo  JEA/DR©



un bouquet de fleurs pour Aung San Suu Kyi, pour Brigitte Engerer, pour Madeleine Roubenne
qui les partageront avec Boualem Sansal


une fleur absurde, jamais décorée de l’ordre des art-bitres des élégances ni de la croix déprogammée

JEA




                                                                                               Photo JEA/DR©


9 commentaires:

  1. Merci de partager avec nous ce beau poème, ce texte fort et les merveilleuses photos de JEA. Souvent je pense à lui : l'actualité et le sort des réfugiés, bien sûr, mais aussi ce quotidien qu'il savait enchanté - fleurs, ciels, lumières, patrimoine, nature, toponymes...
    Avec vous, je me souviens de lui.

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  2. Oui, un tout grand merci. Toujours présent vous le rendez "visible" aujourd'hui par ses mots, sa générosité qui n'oublie personne.
    Sur toutes ces fleurs offertes, manque une belle abeille, lui.
    "Une âme de violoncelle athée", j'aime partager avec vous un de ces souvenirs de JEA.

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  3. Merci pour se partage de poésie ,c'est très beau.
    Une penser pour vous M Andreux.

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  4. moi aussi je me souviens avec émotion de JEA
    et je vous dis MERCI de nous offrir ces photos et ce poème comme une trace toujours vivante

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  5. Photos et texte sont très beaux. Ah, le pouvoir des fleurs...

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  6. Belles fleurs, poésie, nostalgie, combien de fois quand je clique "Publier" je me demande quel commentaire JEA aurait pu écrire

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  7. JEA m'avait fait cadeau d'une de ses très belles photos, un champ de lavandes. Elle est en bonne place, provoque commentaires extasiés de mes visiteurs et je la regarde souvent en lui envoyant un baiser amical. Merci de ce partage

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  8. Souvent je pense à lui...
    Je ne pensais pas que vous aviez continué dans le souvenir.C'est beau... L'ensemble rayonne de générosité.
    J'ai pensé à lui ce jour-là. Il nous manque beaucoup.
    Je suis heureuse de le lire ici.
    Merci de ce partage.

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  9. Je découvre aujourd'hui ces très belles fleurs, dont il aimait parfois accentuer la forme ou la couleur pour les faire siennes et mieux nous les faire partager... avec ses mots doux, drôles et forts.
    Une fleur pleine de pensées pour JEA ce soir et d'autres jours.
    Merci !

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